La mission de l’auditeur de durabilité : un éclairage bienvenu de la part de la Haute Autorité de l’Audit, à l’heure des premiers rapports de durabilité

La Haute autorité de l’audit (« H2A ») a publié début octobre des lignes directrices à destination des futurs auditeurs de durabilité français. Elles définissent et précisent les attendus dans l’exercice de leur mission de certification auprès des entités assujetties à la Directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises[1] (« CSRD »). Un éclairage bienvenu, en attendant la publication de la norme européenne dédiée à l’assurance limitée qui doit être adoptée par la Commission européenne d’ici le 1er octobre 2026.

Les lignes directrices de l’H2A ont un caractère transitoire. Elles ont vocation à s’appliquer aux premiers rapports de durabilité, attendus dès janvier 2025 pour les grandes entreprises cotées,[2] sur la base de l’exercice fiscal 2024.

Pour mémoire, la mission de l’auditeur consiste à vérifier et certifier les informations de durabilité publiées par l’entreprise assujettie à la CSRD, dans le cadre de son rapport de gestion. Les premiers rapports de durabilité feront l’objet d’une assurance dite « limitée » de la part de l’auditeur, pendant une durée minimale de trois ans : il va conclure, le cas échéant, qu’il n’a pas identifié d’erreurs, d’omissions ou d’incohérences importantes dans le rapport de durabilité, susceptibles d’influencer les décisions que pourraient prendre les utilisateurs des informations publiées dans le rapport. Ces conclusions vont donner lieu à l’émission d’un avis.

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Projet d’accord de libre-échange UE-Mercosur : commentaires de spécialistes en propriété intellectuelle

Le projet d’accord de libre-échange entre l’UE et le Mercosur suscite inquiétudes et polémiques. Sans entrer dans ces débats, nous essaierons ici de décrire aussi objectivement que possible, avec nos lunettes d’avocates spécialisées en propriété intellectuelle, ce que le projet prévoit dans notre domaine.

La question de la protection des droits de propriété intellectuelle est souvent incontournable dans le cadre de la négociation d’alliances commerciales internationales. Il s’agit de discuter de la façon dont le système facilitant les échanges entre plusieurs pays prendra en compte les règles du jeu sur la protection des créations, des inventions, des indications géographiques etc. Ainsi, dans le cadre de l’accord qui a institué l’Organisation Mondiale du Commerce en 1994, les pays membres ont négocié un accord spécifique sur les « ADPIC » (aspects de droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce), amendé plusieurs fois depuis.

Le projet d’accord UE-Mercosur ne déroge pas à la règle et consacre tout un chapitre à la propriété intellectuelle. Nous traiterons ici des sous-sections portant sur les indications géographiques, les brevets et les variétés végétales en laissant de côté les droits d’auteur, marques, dessins et modèles et secrets d’affaires pour une éventuelle deuxième publication.

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Du Règlement Bois au Règlement Déforestation

Dans un contexte de forte multiplication des réglementations environnementales, dans le prolongement du Pacte Vert pour l’Europe (ou Green Deal), le Parlement européen et le Conseil ont adopté le 31 mai 2023 un nouveau règlement n°2023-1115 relatif à la déforestation et dégradation des forêts (RDUE). Ce nouveau règlement abroge l’ancien Règlement Bois n°995/2010 (RBUE).

L’objectif de ce nouveau texte est d’assurer une « consommation dans l’Union de produits issus de chaînes d’approvisionnement ‘‘zéro déforestation’’ ». Pour y parvenir, le texte encadre strictement un plus grand nombre de produits que l’ancien règlement qui ne visait que le bois et les produits dérivés de bois. Désormais sont visés sept produits de base : les produits bovins, le cacao, le café, le palmier à huile, le caoutchouc, le soja et le bois ainsi qu’une liste de produits qui contiennent, ont été nourris ou sont fabriqués, à partir de ces produits de base.

Nous vous proposons un focus sur ce sujet à travers deux articles complémentaires :

L’AFA en faveur de l’interopérabilité entre Sapin II et CSRD : attention à l’impact pour l’ensemble des entreprises assujetties à la CSRD

L’Agence Française Anticorruption (« AFA »)[1] a publié le 16 octobre 2024 une présentation destinée à aider les entités assujetties à la Directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (« CSRD »)[2] à rendre compte de leur programme de conformité en matière de lutte contre la corruption. Le message passé va toutefois bien au-delà de ce cadre et plaide en faveur d’un élargissement du champ de Sapin II[3] à des sociétés qui ne seraient pas soumises aux seuils actuels.

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AI or not AI ? Réflexions sur l’« AI-Washing » à l’aune du droit français

IA par-ci, IA par là. L’intelligence artificielle est aujourd’hui incontournable et devient un argument de vente : « Notre produit à la pointe de la technologie utilise de l’IA ». A l’instar du « greenwashing », peut-on parler d’AI-washing ? Aux Etats-Unis, la SEC a récemment sanctionné plusieurs sociétés pour avoir fait croire à leurs clients qu’ils utilisaient des outils d’intelligence artificielle. De tels comportements pourraient-ils être sanctionnés en France ?

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Devoir de vigilance : impacts de la Directive CS3D

L’adoption de la Directive UE 2024/1760 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de développement durable ((« CS3D »), le 24 mai 2024 par le Conseil de l’UE, a mis fin à d’intenses débats concernant le champ d’application et le contenu du texte.

La Directive a pour ambition d’accroître les standards de vigilance des entreprises au regard des impacts négatifs que leur chaîne d’activités peut avoir sur les droits humains et l’environnement. Par le terme « chaîne d’activités », le législateur attend des entreprises qu’elles surveillent les relations commerciales directes et indirectes de chacune de leurs entités. Cette obligation s’appliquera que les relations s’opèrent ou non au sein de l’UE, conférant ainsi à cette réglementation un effet extraterritorial dépassant amplement les frontières des 27.

Ces nouvelles obligations de diligence, et surtout le régime de sanctions qui s’y attache, constituent une évolution particulièrement significative. La France et l’Allemagne, d’ores et déjà pourvues de dispositifs similaires, seront désormais appelées à compléter et modifier leurs obligations nationales afin de se conformer aux nouvelles obligations européennes.

Les lois de transposition sont attendues au plus tard le 26 juillet 2026.

Notre article complet vous éclaire sur le régime et le cadre d’application de la Directive, ainsi que ses impacts sur les lois française et allemande.


Une version en anglais est également disponible : How the CS3D Will Change ESG Obligations for Companies Operating in the EU

Gérer l’imprévision (art 1195 du code civil)  Quelques conseils pratiques à l’aune de décisions récentes

La parole donnée doit être respectée. Pacta sunt servanda. Tous les juristes connaissent l’adage. La digue de l’arrêt Canal de Craponne (1876) a rompu avec la réforme du droit des contrats de 2016. Notre droit s’est aligné sur les standards internationaux en la matière, et autres projets d’harmonisation.  

Le nouvel article 1195 du code civil dispose : « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation. En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe ».

Huit ans plus tard, l’avalanche de recours en révision contractuelle que beaucoup attendaient n’a pas eu lieu. A notre connaissance, la Cour de cassation n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer sur l’article 1195 CC. Les faits, déterminants en la matière, relèvent de l’appréciation souveraine des juges du fond. Nous allons ici commenter quelques décisions récentes éclairantes pour les praticiens, qu’il s’agisse, en amont de rédaction, d’ingénierie contractuelle, ou en aval, de contentieux. Dans les affaires, comme bien souvent dans les prétoires, gagner c’est prendre le maximum de risques avec le maximum de précautions.

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Recevabilité de l’action en indemnisation du préjudice aggravé : divergence entre la Cour de cassation et le Conseil d’État

L’aggravation de l’état de santé d’une victime, même si cette dernière a déjà reçu indemnisation pour son dommage initial, justifie une réparation complémentaire.

L’aggravation correspond à la dégradation de la situation antérieure de la victime en raison d’éléments nouveaux, soit parce que la victime subit une majoration d’un préjudice préexistant, soit parce qu’elle subit un préjudice nouveau[1].

De récents arrêts de la Cour de cassation sont venus confirmer une divergence avec la position du Conseil d’État concernant la recevabilité de l’action en indemnisation du préjudice aggravé.

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Jeux paralympiques : les anneaux tatoués autorisés

A vos marques, prêts, partez !

Aux jeux paralympiques, les athlètes étaient auparavant tenus de couvrir leurs tatouages des anneaux olympiques sous peine de disqualification. Le Comité International Paralympique a décidé de lever cette interdiction pour les Jeux de Paris 2024 qui viennent de commencer. Nos explications et réflexions en tant que spécialistes de la propriété intellectuelle.

Exit les Jeux Olympiques, voici venu le temps des Jeux Paralympiques qui sont juridiquement totalement distincts des JO. Tandis que le tout puissant CIO (Comité International Olympique) règne sur les JO, c’est le CIP (Comité International Paralympique) qui gère les JP. Le CIO a été créé en 1894 et a son siège à Lausanne tandis que le CIP a été créé en 1989 et a son siège à Bonn.

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Mesurer la diversité au travail : consultation publique de la CNIL sur un projet de recommandation

Contexte

De nombreuses organisations privées ou publiques, et tout particulièrement les groupes internationaux, adoptent une démarche visant à l’égalité des chances, la diversité et l’inclusion.  Dans ce contexte les organisations ont recours à des outils pour mesurer la diversité au sein de leurs effectifs. Il peut s’agir d’informations sur le sexe, les préférences sexuelles, la race, l’origine ethnique, la religion, le milieu socio-économique, la santé ou le handicap, qui peuvent les aider à comprendre le profil actuel de leur personnel, à évaluer l’impact de leurs politiques d’égalité des chances, à déterminer les mesures à prendre pour lever les obstacles au changement et à mesurer les progrès accomplis par rapport aux objectifs fixés.

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