Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir ; beaucoup d’entreprises, produisent, utilisent et vendent des nanomatériaux sans le savoir. On les retrouve sous forme de substances, dans des mélanges ou dans des articles vendus à des professionnels ou à des consommateurs.

À l’instar de la France avec son registre R-nano mis en place depuis 2013, la Belgique a prévu la mise en place d’un registre national des nanomatériaux à partir du 1er janvier 2016. Son entrée en vigueur oblige nombre d’entreprises à vérifier si elles sont ou non soumises à l’enregistrement et, le cas échéant, à préparer celui-ci avant le 1er janvier prochain.

Pourquoi ce registre belge aurait-il des répercussions en France ?

L’entrée en vigueur prochaine de ce registre belge ne sera pas sans répercussions en France. En effet, nombre d’entreprises présentes en France vendent des nanomatériaux à une société liée établie en Belgique ou directement à des clients eux-mêmes établis en Belgique.

Une entreprise qui a déjà enregistré ses nanomatériaux en France devra-t-elle aussi le faire en Belgique ?

Oui, mais la Belgique a prévu un enregistrement plus réduit lorsqu’un enregistrement aura été préalablement effectué en France. Par ailleurs, les gouvernements français et belge vont entériner, au cours des semaines à venir, l’échange d’information prévu entre l’ANSES et le SPF Santé publique. Cela signifie que les entreprises ayant enregistré leurs nanomatériaux en France devront être d’autant plus attentives à leurs obligations éventuelles en Belgique.

Une entreprise remplissant ses obligations sous REACH ou n’y étant pas soumise est-elle concernée ?

Le fait qu’une entreprise remplisse ses obligations sous REACH, la législation européenne en matière d’enregistrement des substances chimiques, ou en soit exemptée n’a aucune incidence quant à ses obligations découlant de l’entrée en vigueur du registre belge des nanomatériaux. Celui-ci est totalement autonome par rapport à REACH.

Quelles sont les entreprises concernées ?

Toutes les entreprises important, produisant ou distribuant à des fins professionnelles des substances et produits chimiques sont a priori concernées par le registre belge, pourvu qu’elles soient évidemment actives sur le marché belge. Par exemple, une entreprise française vendant des nanomatériaux à un distributeur belge sera obligée de procéder à l’enregistrement desdits nanomatériaux.

Il importe toutefois de vérifier que lesdites substances et lesdits produits soient bien considérés comme des nanomatériaux au sens de la réglementation belge. Une étude juridique et scientifique doit être menée à cette fin.

Pourquoi la date du 1er janvier 2016 est-elle importante ?

À cette date, les entreprises concernées auront obligatoirement dû déclarer leurs nanomatériaux déjà produits, importés ou distribués à des fins professionnelles. Après cette date, elles devront aussi enregistrer leurs nanomatériaux préalablement à leur mise sur le marché. Par ailleurs, l’enregistrement s’étendra à partir du 1er janvier 2017 aux mélanges contenant des nanomatériaux et pourrait, dès 2018, s’appliquer également aux produits. Des mises à jour annuelles sont également prévues.

En quoi consiste l’enregistrement belge ?

L’enregistrement belge des nanomatériaux consiste en la remise d’un certain nombre d’informations scientifiques et commerciales au Service public fédéral (SPF) Santé. Il s’effectue via un site Internet dédié. Pour assurer le suivi complet du dossier, on ne peut que conseiller de désigner un mandataire, tel qu’un avocat, pour compléter le dossier sur la base d’informations reçues de l’entité sujette à l’enregistrement.

Les informations communiquées dans le cadre d’un enregistrement deviennent-elles publiques ?

Bien que l’information soit a priori destinée uniquement à l’usage des autorités publiques, nous conseillons que toute entreprise procédant à l’enregistrement porte attention à la confidentialité de certaines données communiquées (quantités, usages, clients). En effet, le SPF Santé exige la justification du caractère confidentiel invoqué et ne semble pas vouloir le reconnaître sur simple présomption.

À cette fin, il est utile de fournir une justification juridique à l’appui de la demande de protection des secrets commerciaux ou techniques de l’entreprise. Les entreprises doivent aussi tenir compte des risques liés au droit de la concurrence si d’aventure des données (par exemple les quantités produites) venaient à être rendues publiques, notamment dans un rapport annuel.

Une entreprise est-elle obligée d’informer ses travailleurs à propos de l’enregistrement de nanomatériaux ?

Les entreprises établies en Belgique devront informer leur comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT) au sujet de l’enregistrement de nanomatériaux. Les organisations représentatives de travailleurs ayant largement souhaité la mise en place du registre belge des nanomatériaux, les entreprises devront donc aussi communiquer adéquatement au sujet de la présence de nanomatériaux sur les lieux de travail.

Quelles sont les sanctions en cas d’absence d’enregistrement ?

Le défaut d’enregistrement peut être sanctionné par des peines allant jusqu’à 3 ans de prison et 720.000 euros d’amende.

L’enregistrement de nanomatériaux concerne-t-il les fournisseurs et les clients des entreprises ?

L’enregistrement vise toute la chaîne de la mise sur le marché de nanomatériaux, sauf la vente aux consommateurs. Chaque entreprise doit donc aussi mettre en place une politique de suivi et de coordination entre ses fournisseurs et ses propres clients professionnels, y compris sur le plan contractuel.

 

Article rédigé par Anthony Bochon