Dans un arrêt du 28 juin 2006, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a pris position sur la rupture fautive des pourparlers et sur l’indemnisation du préjudice de la perte de chance de réaliser les gains escomptés du contrat.

Trois parties menaient des négociations pour la vente d’un terrain destiné à la construction d’un immeuble. Les pourparlers n’aboutissant pas à la signature d’un protocole de vente, le vendeur a décidé de vendre son bien à un tiers. Les deux autres négociateurs, considérant qu’il y avait rupture abusive des pourparlers, demandent réparation du préjudice de la perte de chance de retirer les gains escomptés du contrat.

La Cour d’appel de Nouméa avait, dans un premier temps, accédé à cette demande, considérant qu’elle pouvait évaluer le préjudice résultant de la disparition du programme immobilier envisagée.
La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel : la victime d’une rupture fautive des pourparlers ne peut demander la réparation de la perte de chance de réaliser les gains escomptés du contrat.

Prenant ainsi position sur une jurisprudence jusque-là fluctuante, la Haute Juridiction considère que s’il est admis que l’on puisse rechercher la responsabilité délictuelle de l’auteur de la rupture, la perte de chance du gain escompté du contrat ne constitue pas un préjudice réparable.

La Cour confirme ici un arrêt de revirement dit "arrêt MANOUKIAN" du 26 novembre 2003 . Elle prend une position ferme sur le sort de l’indemnisation de la perte de chance de tirer profit du contrat qui n’est plus, aujourd’hui, envisageable.

En effet, la Cour de cassation considère que la rupture des pourparlers ne peut être la cause du préjudice de la perte d’une chance de tirer profit du contrat, puisqu’une telle rupture relève de la liberté contractuelle de contracter ou de ne pas contracter et ne constitue donc pas une faute.

On ne peut ainsi retenir la responsabilité civile du contractant ayant simplement exercé un droit.
Cependant, la doctrine semble considérer que si la rupture des pourparlers ne constitue pas une faute, les "circonstances" de cette rupture peuvent quant à elle se révéler fautive.

Elle précise également que seul le recours à la perte d’une chance de "tirer profit du contrat" sera désormais irrecevable et qu’un contractant pourra toujours, par exemple, se prévaloir de la perte d’une chance de conclure un contrat avec un tiers.