Dans un arrêt du 4 octobre 2023 (n°466887, Société Collectivision), le Conseil d’Etat revient sur sa jurisprudence antérieure, relative au doublon des fonctions d’un dirigeant au titre de son mandat social avec la conclusion d’une convention de prestations de services.

En effet, la position constante de la jurisprudence était de rejeter, sur la base de différents fondements juridiques, la déductibilité des honoraires versés dans le cadre de convention de prestations de services, lorsque lesdits honoraires correspondent à des services qui entrent légalement dans le cadre du mandat social de la direction de la société, que ce mandat soit rémunéré ou non (cf notamment (i) Cour administrative d’appel Nancy, 9 octobre 2003, n°98-2182, SA Gamlor, pour absence de gestion normale, et (ii) Cour de Cassation, chambre commerciale, 14 septembre 2010, n°09-16.084, Samo Gestion ; Cour de Cassation, chambre commerciale, 23 octobre 2012, n°11.23-376, Mecasonic, pour absence de cause).

Le Conseil d’Etat, tout en cassant la décision des juges d’appel, affirme pour la première fois que la rémunération d’un dirigeant d’une société par une société tierce, en vertu d’une convention de prestations de services, ne relève pas d’un acte anormal de gestion si la société bénéficiaire des prestations de services établit que ses organes sociaux compétents ont entendu en réalité, par le versement des honoraires correspondant à ces prestations, rémunérer indirectement le dirigeant et qu’ainsi ce versement n’est pas dépourvu pour elle de contrepartie.

Le Conseil d’Etat précise que le fait qu’une société ne verse pas de rémunération à son dirigeant au cours d’un exercice ne constitue pas une décision de gestion faisant obstacle à la rémunération de ce même dirigeant soit (i) sur décision des organes sociaux compétents, au cours d’un exercice postérieur, le cas échéant à titre rétroactif, ou (ii) au cours du même exercice, par l’intermédiaire d’une autre société.

La rapporteure publique, Mme Emilie Bokdam-Tognetti, précise dans ses conclusions qu’il convient que la rémunération totale, directe et indirecte, des fonctions de direction ne soit pas excessive, afin que sa déductibilité ne soit pas remise en cause.

Il convient de préciser que le Conseil d’Etat et la rapporteure publique laissent ouverte la question de la gestion des autres risques afférents à la conclusion de ce type de conventions de prestations de services, notamment en matière de TVA ou de cotisations sociales.