1. La distinction entre le « nantissement de compte » et le « gage-espèce »
En l’absence de définition légale, ce type de garantie reçoit diverses qualifications de la doctrine et suscite des nombreux débats sur sa nature. Les deux qualifications les plus fréquemment retenues sont le « nantissement de compte » et le « gage-espèce ».

Le gage correspond au nantissement d’une chose matérielle ne nécessitant pas de formalisme pour sa constitution, ni de désignation d’expert pour en fixer le prix lors de la réalisation (mise en œuvre) du gage. La constitution du nantissement suppose l’accomplissement de formalités et sa réalisation suppose soit l’accord du débiteur, soit un titre exécutoire (jugement). En revanche, le créancier est dispensé de recourir à l’évaluation d’un expert, la valeur de la sûreté constituée d’une somme d’argent ne soulevant pas de difficulté.

Il semblerait qu’on puisse retenir de la doctrine qu’une distinction s’opère selon que le titulaire du compte est le débiteur (nantissement) ou le créancier (gage-espèce), étant précisé que ces vocables sont utilisés dans cet article pour faciliter les distinctions opérées par la jurisprudence.
Le gage-espèce, en raison du caractère consomptible et fongible de l’argent, opère le transfert immédiat de la propriété des sommes inscrites sur le compte ouvert au nom du créancier dans son patrimoine, sans aucune formalité.

Le créancier a donc la libre disposition des espèces remises, mais il devient titulaire d’une obligation de restitution envers le débiteur.

Si sa créance garantie devient certaine, liquide et exigible, une compensation légale s’opère entre la créance du créancier et la créance de restitution du débiteur sur les sommes d’argent séquestrée.

Dans le cas du nantissement, si la créance garantie est impayée, le créancier doit obtenir l’accord du débiteur pour obtenir sa garantie ou l’attribution judiciaire des sommes bloquée sur le compte nanti. Le débiteur peut toutefois avoir d’ores et déjà autorisé le créancier à réaliser le nantissement dans le contrat de nantissement.

2. La compensation légale avant le jugement d’ouverture et… la compensation des dettes connexes après le jugement d’ouverture
En conséquence, dans les deux cas, si la date à laquelle les conditions d’une compensation légale sont remplies intervient avant la date du jugement d’ouverture de la procédure à l’encontre du débiteur, la créance du bénéficiaire est éteinte et n’a pas à être déclarée.

En revanche, à compter de la date du jugement d’ouverture il est fait interdiction au débiteur de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, mais cette interdiction ne fait pas obstacle au paiement par compensation de créances connexes (article L. 622-7 du Code de commerce).

La connexité des créances suppose qu’elles soient au moins certaines à la date du jugement d’ouverture, sans nécessairement être liquides et exigibles, et qu’elles dérivent d’un même contrat ou de contrats distincts mais suffisamment liés entre eux.

Dans ce cas, le créancier doit déclarer sa créance au représentant des créanciers.

En revanche si la compensation légale n’avait pas pu s’opérer avant la date du jugement d’ouverture ou si à la date de ce jugement la créance n’était pas au moins certaine dans son principe, le mandataire (ou le liquidateur) judiciaire serait en mesure de demander le remboursement de la somme séquestrée en vertu de l’obligation de restitution du créancier envers le débiteur, que celle-ci soit déposée sur un compte ouvert au nom du débiteur ou du créancier.