Dans le cadre d’un contentieux avec leur assureur multirisques habitation, des assurés ont soulevé deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) tenant à la conformité de l’article L. 114-1 du Code des assurances avec :
- d’une part, le principe d’égalité devant la justice en ce « qu’il soumet les actions dérivant du contrat d’assurance engagées par des assurés non professionnels à l’encontre de leur assureur à un délai de prescription de deux ans alors que, dans les autres contrats, les actions introduites par les consommateurs à l’encontre des professionnels sont soumises au délai quinquennal de droit commun prévu à l’article 2224 du code civil » ;
- d’autre part, le respect des droits de la défense et l’existence d’une procédure juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des justiciables et des parties à une même procédure.
La Cour de cassation estimant que ces deux QPC présentaient un caractère sérieux, en a saisi le Conseil constitutionnel.
Par une décision du 17 décembre 2021[1], le Conseil constitutionnel a confirmé la conformité de l’article L. 114-1 du Code des assurances à la constitution, au motif de la spécificité du contrat d’assurance par rapport aux autres contrats soumis au code de la consommation. Il conclut ainsi que « La différence de traitement critiquée par les requérants, qui est ainsi fondée sur une différence de situation, est en rapport avec l’objet de la loi » (pts 14 et 15).
Le Conseil constitutionnel ajoute ensuite qu’« en prévoyant l’application d’un même délai de prescription de deux ans tant aux actions des assurés qu’à celles des assureurs, les dispositions contestées n’instituent aucune différence de traitement entre les parties à un contrat d’assurance » (pts 16 et 17).
Deux enseignements peuvent être tirés de la décision du Conseil constitutionnel :
- Le contrat d’assurance est particulier et ne peut être assimilé à un contrat soumis au code de la consommation (par exemple, un contrat conclu avec un opérateur téléphonique) ;
- Il n’est pas justifié de traiter les parties aux contrats d’assurance de manière distincte, sauf à traiter de manière inégale l’assureur au motif qu’il serait professionnel et/ou à favoriser l’assuré au motif qu’il serait profane. Rappelons à cet égard que la prescription n’est opposable à l’assuré que s’il a été dûment informé de ses droits, de sorte qu’il dispose des clés pour les faire valoir et n’est ainsi pas nécessairement la « partie faible ».
Article co-rédigé par Stéphanie Simon et Pierre Declercq