Alors que dans les années 90, le scandale de la vache folle avait entrainé la mise en place par les autorités d’un processus de traçabilité pour l’ensemble de la chaîne bovine, va-t-on prochainement assister à un nouveau renforcement de la réglementation en matière d’étiquetage des denrées alimentaires ? En attendant, il apparaît utile dans le contexte actuel de rappeler les grandes lignes de la réglementation française en matière d’étiquetage des denrées alimentaires, et en particulier celles à base de viande bovine…
L’étiquetage des denrées alimentaires ne doit pas être trompeur
Tout d’abord, les articles L.121-1 et suivants du Code de la consommation prohibent de manière générale les pratiques commerciales trompeuses qui reposent sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur.
Ce principe général est repris avec plus de détails en matière d’étiquetage de denrées alimentaires à l’article R.112-7 du Code de la consommation, qui dispose que « l’étiquetage et les modalités selon lesquelles il est réalisé ne doivent pas être de nature à créer une confusion dans l’esprit de l’acheteur ou du consommateur, notamment sur les caractéristiques de la denrée alimentaire et notamment sur la nature, l’identité, les qualités, la composition, la quantité, la durabilité, l’origine ou la provenance, le mode de fabrication ou d’obtention. » Il y est également précisé que « l’étiquetage ne doit comporter aucune mention tendant à faire croire que la denrée alimentaire possède des caractéristiques particulières alors que toutes les denrées alimentaires similaires possèdent ces mêmes caractéristiques».
La violation de ces dispositions est susceptible de constituer les délits de fraude et de falsification (à condition d’apporter la preuve de tous les éléments de ces infractions, notamment l’élément intentionnel) dont la sanction prononcée peut aller jusqu’à :
- pour les personnes physiques :
- en l’absence de circonstances aggravantes: un emprisonnement de 2 ans et une amende de 37 500 €,
- en cas de circonstances aggravantes (par exemple, si la fraude/falsification a eu pour conséquence de rendre l’utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé de l’homme) : un emprisonnement de 4 ans et une amende de 75 000 €.
- pour les personnes morales :
- en l’absence de circonstances aggravantes: une amende de 187 500 €, et des peines complémentaires telles que l’interdiction, provisoire ou non, d’exercer l’activité à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, confiscation des denrées alimentaires objet de l’infraction, publication de la décision prononcée dans la presse ou les médias audiovisuels, etc.
- en cas de circonstances aggravantes : une amende de 375 000 € et des peines complémentaires.
Si les infractions ne constituent pas les délits de fraude ou falsification, car tous les éléments ne sont pas réunis, alors elles sont punies d’une amende contraventionnelle de 450€, cette amende s’appliquant autant de fois que le prévenu a commis d’infractions.
L’étiquetage des denrées alimentaires doit être en langue française
L’article 2 de la loi dite « Toubon » n°94-665 du 4 août 1994 pose le principe général selon lequel l’emploi de la langue française est obligatoire pour la désignation, l’offre et la présentation d’un produit ou d’un service. En outre, l’article 4 de la loi dispose que dans les cas où les mentions sont complétées d’une ou plusieurs traductions, la présentation en français doit être aussi lisible, audible ou intelligible que la présentation en langues étrangères. En matière d’étiquetage, cette obligation est reprise à l’article R.112-8 du Code de la consommation, qui vient préciser la possibilité pour les étiquetages d’être en plusieurs langues.
En outre, selon l’article 2.1.2 de la circulaire d’application du 19 mars 1996, toute mention faite dans une autre langue ne doit pas, en raison de sa taille, son graphisme, ou sa couleur, être mieux comprise que celle établie en français. L’article 2.1.1 précise qu’alors même qu’une marque constituée d’un ou plusieurs mots étrangers n’a pas besoin d’être traduite en français, la mention en langue étrangère accompagnant une marque doit pour sa part être traduite en français, et ce de manière aussi lisible, audible ou intelligible que la présentation en langue étrangère.
Conformément à l’article 1 du décret n° 95-240 du 3 mars 1995, le non-respect de ces règles est puni d’une amende de 750 € pour les personnes physiques, et d’une amende 3750€ pour les personnes morales, cette amende s’appliquant autant de fois que le prévenu a commis d’infractions.
L’étiquetage des denrées alimentaires à base de viande bovine doit comporter certaines mentions obligatoires
La règlementation française en matière d’étiquetage de denrées alimentaires à base de viande bovine, est prévue par (i) les règlements communautaires n°1760/2000 du 17 juillet 2000 établissant un système d’identification et d’enregistrement des bovins et concernant l’étiquetage de la viande bovine et des produits à base de viande bovine, et n°1825/2000 du 25 août 2000 portant modalités d’application du règlement précité, qui sont d’application directe en France ; ainsi que par (ii) les articles R.214-1 et suivants du Code de la consommation venant prévoir les modalités d’application des règlements communautaires précités.
Nous ne ferons pas ici une description exhaustive de l’ensemble des mentions devant impérativement figurer sur l’étiquetage de denrées alimentaires à base de viande bovine. Il est néanmoins important de savoir que ces mentions différent selon qu’il s’agit de viande hachée ou non.
En effet, les mentions suivantes doivent notamment figurer sur l’étiquetage de viande bovine non hachée:
- le numéro de code ou de référence assurant la relation entre la viande et l’animal ;
- le numéro d’agrément de (i) l’abattoir ayant procédé à l’abattage de l’animal, (ii) l’atelier de découpage ayant procédé au découpage de la carcasse ;
- l’Etat membre ou le pays tiers (i) de naissance de l’animal, (ii) d’engraissement de l’animal, (iii) où l’abattoir est situé ; (iv) où l’atelier de découpage est situé.
Lorsque toutes ces étapes se déroulent dans le même pays, la seule mention dudit Etat membre ou pays tiers suffit et doit apparaître sous la forme « Origine : nom de l’Etat membre », ou « Origine : nom du pays tiers ».
Cependant, lorsque l’animal a été élevé pendant 30 jours ou moins dans un pays différent du pays de naissance ou d’abattage, il n’est pas requis de le mentionner sur l’étiquette.
Enfin, lorsqu’il s’agit de viande bovine provenant d’animaux importés vivants dans la Communauté Européenne, mais pour lesquels l’information concernant le lieu de naissance et/ou d’élevage autre que le dernier lieu d’élevage n’est pas disponible, l’indication du lieu de naissance et/ou d’élevage est remplacé par la mention « importation d’animaux vivants dans la CE » ou « importation d’animaux vivants en provenance de [nom du pays tiers] ».
Par dérogation aux dispositions précitées, les mentions quant aux pays de naissance ou d’engraissement n’ont pas obligatoirement à figurer sur l’étiquetage de viande bovine hachée, alors que les mentions suivantes doivent y figurer :
- la mention « Elaboré à [nom de l’Etat membre ou du pays tiers] »,
- la mention « Origine : nom de l’Etat membre ou du pays tiers » lorsque le pays d’élaboration est différent du pays d’origine.
Squire Sanders est un cabinet d’avocats intégré, présent dans 19 pays, qui dispose de 39 bureaux dans le monde. Les avocats du cabinet ont su développer une expertise reconnue dans le secteur de la sécurité alimentaire et de l’étiquetage, que ce soit dans le domaine du conseil ou du contentieux. Nous avons conseillé de nombreux exploitants du secteur alimentaire par le passé, notamment dans des contentieux liés à la santé en matière de produits laitiers, de denrées alimentaires asiatiques, de fruits frais ou emballés contaminés par des huiles non destinées à la consommation humaine, etc.