Dans un arrêt du 1er mars 2011, rendu dans l’affaire C-236/09 ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE introduite par la Cour constitutionnelle de Belgique (« Association belge des Consommateurs Test-Achats ASBL, Yann van Vugt, Charles Basselier contre Conseil des ministres »), la CJUE s’est prononcée sur les questions préjudicielles suivantes :

1. L’article 5, paragraphe 2, de la directive 2004/113/CE […] est-il compatible avec l’article 6, paragraphe 2, du traité UE et, plus spécifiquement, avec le principe d’égalité et de non-discrimination garanti par cette disposition ?

2. En cas de réponse négative à la première question, le même article 5, paragraphe 2, de [cette] directive est-il également incompatible avec l’article 6, paragraphe 2, [UE], si son application est limitée aux seuls contrats d’assurance sur la vie ?

Rappel des faits : les requérants avaient introduit devant la Cour constitutionnelle de Belgique un recours en annulation de la loi du 21 décembre 2007 transposant en droit belge la directive 2004/113 précitée, estimant que cette loi, qui met en œuvre la faculté de dérogation offerte par l’article 5, paragraphe 2, de ladite directive, est contraire au principe de l’égalité entre les hommes et les femmes.

Précisons que l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2004/113 posait le principe selon lequel les différences en matière de primes et de prestations découlant de l’utilisation du sexe comme facteur dans le calcul de celles-ci devaient être abolies au 21 décembre 2007 au plus tard, mais que l’article 5, paragraphe 2 (dont il est question ici) de ladite directive dérogeait au principe précité en permettant aux États membres dont le droit national n’appliquait pas déjà la règle de la prime unisexe, la faculté de décider, avant le 21 décembre 2007, d’autoriser des différences proportionnelles en matière de primes et de prestations pour les assurés lorsque le sexe est un facteur déterminant dans l’évaluation des risques, sur la base des données actuarielles et des statistiques pertinentes et précises.

La Cour, ayant constaté qu’« en l’absence, dans la directive 2004/113, d’une disposition sur la durée d’application de ces différences, les États membres ayant fait usage de ladite faculté sont autorisés à permettre aux assureurs d’appliquer ce traitement inégal sans limitation dans le temps », a jugé que l’article 5, paragraphe 2, qui permet donc de maintenir, sans limitation dans le temps, une dérogation à la règle des primes et des prestations unisexes, est contraire à la réalisation de l’objectif d’égalité de traitement entre les femmes et les hommes que poursuit la directive 2004/113 et incompatible avec les articles 21 et 23 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Estimant que cette disposition devait être considérée comme invalide à l’expiration d’une période de transition adéquate, la Cour a fixé au 21 décembre 2012 la date à laquelle l’article 5, paragraphe 2 en question serait invalide.

Cet arrêt, qui n’est pas susceptible de recours, a suscité de vives réactions dans le monde de l’assurance, notamment en France où cette différence de tarification hommes/femmes est communément pratiquée. Les assureurs vont donc devoir repenser en profondeur leur tarification et leurs prestations, afin de tenir compte de cette injonction tout en minimisant les impacts pour les assurés.