Cass. soc 10 janvier 2012, n°10-23.482 – Cass.soc.3 novembre 2011, n° 10-18.036
La chambre sociale de la Cour de cassation – et c’est globalement un bien – a toujours souhaité protéger la liberté individuelle des citoyens salariés, au-delà des intérêts réels ou supposés de tiers et notamment de l’employeur.
En effet, les conditions dans lesquelles un employeur peut contrôler l’activité de ses salariés ont toujours été encadrées. L’exigence de loyauté absolue que doit montrer l’employeur dans ses relations de travail interdit notamment tout recours à des dispositifs clandestins de contrôle de l’activité des salariés, d’une manière générale.
Régulièrement, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle que si l’employeur peut contrôler et surveiller l’activité de ses salariés pendant le temps de travail, le recours a des dispositifs clandestins qui n’ont pas été portés à la connaissance du salarié est interdit et toute preuve recueillie au moyen d’un tel dispositif est irrecevable.
L’article L.1222-4 du Code du travail énonce qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance.
La question posée à la Cour de cassation dans l’arrêt du 10 janvier 2012 (n°10-23.482 , Boymond c/Société Technique Française du nettoyage) était de savoir si ce principe devait s’appliquer lorsque le manquement du salarié à ses obligations contractuelles aurait pu être constaté par des caméras de vidéosurveillance installées chez un client de la société où les salariés intervenaient pour exécuter leur travail quotidien ?
La Cour de cassation confirme que l’employeur ne peut être autorisé à utiliser comme mode de preuve les enregistrements d’un système de vidéosurveillance installé sur le site d’un client permettant le contrôle de leur activité si les intéressés n’ont pas été préalablement informés non seulement de l’existence de ce dispositif de contrôle mais également du fait que ce dispositif pourrait être utilisé pour contrôler leur activité et leurs horaires de travail.
Dans un arrêt rendu quelques mois plus tôt (Cass.soc. 3 novembre 2011, n° 10-18.036 Société Moreau Incendie), la Cour de cassation a jugé que l’utilisation par l’entreprise d’un système de géolocalisation d’un véhicule, à d’autres fins que celles qui avaient été portées à la connaissance du salarié était illicite et constituait un manquement suffisamment grave justifiant pour le salarié la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur.
Au cas d’espèce, l’entreprise aurait du préciser par écrit au salarié que ce système, qui était destiné à optimiser les visites auprès de clients et à améliorer le processus de production, pouvait également servir à contrôler ses activités et son temps de travail.
Comme dans de nombreux domaines du droit social, la plus grande rigueur et la plus grande prudence s’imposent aux employeurs qui sont tous, par ces arrêts, invités à vérifier à nouveau que les procédures de mise en place de tous les systèmes susceptibles de permettre un contrôle de l’activité des salariés ont bien été portés à la connaissance de chacun d’eux, de même que la finalité de ces dispositifs. A défaut, l’employeur s’expose à de sérieuses désillusions dans la mesure où la preuve d’un manquement, le cas échéant grave, tel qu’un vol par exemple, sera tout simplement irrecevable !