Cass. Soc. 23 mai 2013, n° 12-13865

Un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 23 mai 2013 précise le contexte dans lequel une rupture conventionnelle est susceptible d’être remise en cause, avec, à la clé, le prononcé d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur d’une avocate salariée, spécialisée en droit social ayant trois ans d’ancienneté, lui adressait une lettre détaillant ses insuffisances professionnelles.

L’employeur mentionnait de nombreuses difficultés rencontrées par la salariée et remarquait que celles-ci étaient incompatibles avec le maintien de ses fonctions. Il invitait donc l’avocate à envisager la conclusion d’une rupture conventionnelle, mesure alternative permettant de ne pas « ternir le parcours professionnel » de la salariée.

Dans un premier temps, la Chambre sociale considère que l’existence d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la rupture conventionnelle, décidant ainsi de ne pas ajouter à la loi une condition qu’elle ne prévoyait pas.

La Chambre sociale met ainsi un terme à des divergences de jugement entre les cours d’appel. En effet, certains juges du fond avaient pu estimer qu’à l’instar du régime appliqué à la rupture amiable, l’existence d’un litige entre les parties remettait en cause le consentement libre du salarié.

Cet argumentation étant rejetée, peu importe que la lettre donne à la salariée la preuve de l’existence d’un différend : cela n’empêche pas de conclure une rupture conventionnelle. C’est l’apport juridique de cet arrêt.

Toutefois, les juges de cassation rappellent ensuite l’article L.1237-11 du Code du travail qui dispose que la rupture ne peut pas être imposée par l’une des parties. C’est ainsi sur le terrain des vices du consentement, en l’occurrence, de la violence (morale) (article 1112 du Code civil) que la rupture conventionnelle conclue est finalement annulée.

Proscrite par le droit commun des contrats, la violence est appliquée ici à une relation de travail. Elle se comprend comme la pression exercée par l’employeur à l’encontre de la salariée lorsqu’il mentionne dans son courrier que la rupture conventionnelle est un moyen de rompre le contrat de travail sans ternir le parcours professionnel. Cette phrase était de trop.

Plus encore, en l’absence d’écrit envoyé par l’employeur, les juges de la Cour de cassation avaient déjà estimé que l’existence d’un harcèlement moral et des troubles psychologiques en résultant constituaient également une situation de violence morale justifiant l’annulation de la convention (Cass. soc., 30 janv. 2013, n°11-22.332).

En l’espèce, dans cet autre arrêt, la salariée avait été en arrêt maladie à la suite d’un avertissement donné par son employeur. La convention de rupture était signée le jour même où la salariée reprenait le travail après l’avis d’aptitude pris par le médecin du travail. La salariée avait pu établir un vice du consentement par un certificat rédigé par une psychologue quinze jours avant la rupture.

En pratique, ces arrêts montrent que la prudence est de rigueur lors de la négociation d’une rupture conventionnelle. Il s’agit pour les employeurs d’être attentifs à la rédaction de courriers adressés au salarié et au contexte entourant la conclusion de la convention afin d’éviter qu’une menace ne puisse être retenue et que la rupture conventionnelle ne se transforme en licenciement sans cause réelle et sérieuse.