CJUE 7 mars 2018, affaires C-274/16, C-447/16 et C-448/16
Nous avons eu l’occasion de nous intéresser à l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 7 mars dans trois affaires venant préciser les règles de compétences territoriales des juridictions saisies de litiges opposant les passagers aux compagnies aériennes et où se posait la question de l’application des dispositions de l’article 5.1 du Règlement 44/2001 relatives aux règles de compétences territoriales en matière contractuelle.
L’article 5.1 dispose en effet qu’« une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite, dans un autre État membre: 1) a) en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée ».
Les deux premières affaires, et nous vous renvoyons à notre article du 9 avril dernier pour plus de détails, ont amené la Cour à se prononcer sur l’application de cet article dans le cadre des recours intentés par les passagers à l’encontre des compagnies aériennes sur le fondement du Règlement européen 261/2004 lorsque :
i) la compagnie aérienne mise en cause n’est pas domiciliée sur le territoire d’un état membre de l’Union Européenne (affaire C-447/16), et
ii) la compagnie aérienne mise en cause n’est pas le cocontractant des passagers concernés.
Cette troisième affaire aborde la question de l’application de l’article 5.1 en des termes un petit peu différents, même si les principes posés par la Cour apparaissent bien entendu pertinents pour les autres affaires.
Dans cette dernière espèce, les passagers avaient réservé un vol au départ de Melilla en Espagne pour Francfort avec une escale à Madrid. En raison d’un retard sur le premier segment du vol, les passagers ont manqué leur correspondance pour Francfort. Les demandeurs ont ensuite saisi le tribunal de district de Francfort (« Amsgericht Frankfurt Am Main ») aux fins d’obtenir une indemnisation sur le fondement de l’article 7 du Règlement européen n°261/2004.
Le tribunal ayant conclu à son incompétence internationale au profit des juridictions de Mellila et Madrid, les demandeurs ont formé un recours devant la Cour Fédérale de justice qui a, elle-même, saisi la Cour de Justice de l’Union Européenne de deux questions préjudicielles afférentes à l’application de l’article 5.
Cette espèce invitait ainsi la Cour de justice l’Union européenne à se prononcer i) sur l’étendue du champ d’application de cet article et ii) du lieu d’exécution de la prestation contractuelle à supposer retenue l’application de l’article 5.
Il est en effet permis de s’interroger sur la pertinence d’appliquer les dispositions de l’article 5 du Règlement 44/2001 à une demande d’indemnité fondée sur l’article 7 du Règlement européen n°261/2004. Par ailleurs, cet écueil levé, la question de la compétence des juridictions allemandes se pose également puisque i) les difficultés ont été rencontrées par les passagers sur le premier segment du vol, soit sur le vol Melilla – Madrid interne à l’Espagne, et ii) que la compagnie aérienne ayant opéré le vol litigieux n’était pas le cocontractant des passagers. Au regard de l’ensemble de ces éléments factuels, rien ne rattachait ainsi le litige à l’Allemagne, si ce n’est le lieu d’arrivée du second vol.
Après avoir relevé que la notion de matière contractuelle telle que visée à l’article 5 du Règlement 44/2001 couvrait les demandes d’indemnisation fondées sur l’article 7 du Règlement européen, la Cour a considéré comme pour l’affaire C274-16 que les juridictions territorialement compétentes étaient (dans l’hypothèse où l’incident à l’origine du retard est intervenu sur le premier segment du vol lequel est opéré par une compagnie aérienne avec laquelle les passagers n’avaient pas contracté) celles du lieu d’arrivée du second vol.