La loi n°2008-596 du 25 juin 2008 avait pour objectif l’introduction d’une procédure de rupture d’un commun accord du contrat de travail de nature à pacifier les relations sociales. La rupture conventionnelle devait, grâce à un régime propre, être porteuse de garanties efficaces pour les départs volontaires et négociés autrefois uniquement réglés par la transaction ou la rupture amiable.

Les atouts de cette procédure sont sa rapidité et sa simplicité apparente. Le principe de la rupture est arrêté lors d’entretiens entre l’employeur et son salarié, un écrit signé des deux parties règle les modalités de l’accord (notamment concernant le montant des indemnités). Des garanties supplémentaires ont également été prévues par le biais du délai de rétractation minimum de quinze jours calendaires et de la demande d’homologation adressée au Directeur départemental du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle compétent.

Les arrêts rendus respectivement par la Cour d’Appel de Bourges et de Lyon les 16 et 23 septembre 2011 éclaircissent l’étendue de ces « garanties » de la rupture conventionnelle.

D’une part, l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Bourges (16 septembre 2011, n°10/01735) précise que le droit de rétractation prévu par l’article L. 1237-13 du Code du travail (« A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie. ») peut s’effectuer par courriel dès lors que preuve est conservée de la réception d’un tel envoi. De plus, le contexte de ce litige n’est pas dénué d’intérêt. Le salarié prétendait avoir envoyé un courriel de rétractation tandis que son employeur soutenait ne rien avoir reçu de tel. Aucune preuve n’a d’ailleurs pu être apportée de la bonne réception de la rétractation litigieuse. Au demeurant, si la Cour a vu dans les agissements du salarié une constitution de preuve « a posteriori », la procédure a été suivie jusqu’en Cour d’Appel afin de régler le départ d’un salarié qui avait 6 mois d’ancienneté.

La prudence est donc de mise pour se rétracter et/ou accuser réception d’une rétractation de rupture conventionnelle, situations exposant potentiellement les sociétés à une remise en cause de la convention même homologuée et faisant courir des risques de requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse avec les conséquences financières qui s’y attachent.
D’autre part, l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Lyon (23 septembre 2011, n°10/09122) délimite davantage le contrôle du juge sur « la liberté de consentement des parties » (article L. 1237-11 du Code du travail). Ainsi, la Cour a jugé nulle la convention de rupture dont le double n’a pas été remis au salarié. En effet, en l’absence d’un tel double, le juge n’a pas pu apprécier la connaissance que le salarié avait des termes de la convention. De surcroît, le salarié n’avait ni daté la convention, ni fait précéder sa signature de la mention « lu et approuvé », mentions obligatoires (Circ. DGT, n° 2008-11, 22 juillet. 2008) qui ont permis à la Cour de considérer que la tenue du second entretien (contesté par le salarié) n’était pas démontrée.

La rupture conventionnelle génère déjà un contentieux fourni et cela même après homologation conformément à l’article L.1237-14 du Code du travail, qui ouvre un délai de 12 mois après la date d’homologation pour former un recours. La jurisprudence, à l’image des deux arrêts commentés, comble peu à peu les imprécisions législatives et démontre l’insécurité de ce mode de rupture du contrat de travail. Nous recommandons une grande rigueur formelle.