L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 26 avril 2006 vient préciser la jurisprudence française en matière de compétence dans le cas d’une contrefaçon, partielle, d’une marque française par un site internet édité à l’étranger (Liban), passif en France.
L’existence d’un site étranger qui cause un préjudice en France peut donner lieu à une action en justice en France, dès lors qu’il peut être établi que les tribunaux français sont compétents. Pour ce faire, il faut un lien fort de rattachement à la compétence territoriale française. La Cour d’appel de Paris rappelle qu’un lien suffisant, substantiel ou significatif, entre les faits ou actes et le dommage allégué doit être établi.
Le simple constat de la possibilité de l’accès par des français à un site étranger ne suffisant plus pour rattacher un litige à la compétence des tribunaux français, les juges recherchent quelle est la destination du site, envers quel public déterminé.
Pour qu’une action en contrefaçon à l’encontre d’un site étranger soit étudié par les tribunaux français, il faut en effet que le site litigieux "vise le public français" (jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 11 février 2003 et arrêt de la Cour de cassation "Hugo Boss" du 11 janvier 2005).
A cet égard, le critère de la langue utilisée peut certes servir d’indice mais les tribunaux doivent généralement aussi procéder à une analyse approfondie du contenu du site et tenir compte de l’existence ou non d’un réseau de commercialisation des produits effective en France pour évaluer leur compétence territoriale.
Dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt du 26 avril 2006, la compétence des tribunaux français a été écartée s’agissant d’un site libanais que l’on peut certes consulter de France, mais dont les pages sont rédigées en anglais et qui n’offre pas à la vente de produits aux consommateurs français lesquels produits ne sont pas effectivement commercialisés en France.
Si le cas échéant, le critère de rattachement à la compétence des tribunaux français est estimé suffisant pour un tribunal français, il n’est pas non plus dit que le droit applicable soit le droit français car le lien avec le droit français doit être particulièrement solide. S’il est démontré des liens plus étroits avec un autre pays, le droit dudit pays sera applicable.
Enfin, si les juges français s’estiment toutefois compétents et appliquent le droit français, encore faut-il que la décision puisse être exécutée dans le pays étranger. Il est toujours loisible aux pays étrangers de ne pas accorder l’exequatur à la décision française, ce qui a été manifestement le cas dans l’affaire Yahoo. Prudence donc…