Apologie du slow, par Fabio Viscogliosi aux éditions Stock.

Nous retrouvons Fabio avec plaisir pour aller musarder sur les chemins de sa mémoire, qui est aussi un peu la mienne, car égoïstement je m’accapare ces 109 textes brefs. J’aime cette forme courte et poétique, ces textes qui tissent, entre perception de la réalité et de la fiction une tentative réussie d’aborder le quotidien comme une aventure. Cette balade au tempo qui ne ressemble qu’à lui, nous entraine avec cette attitude unique à la rencontre de ses souvenirs. Nous avions eu la chance de recevoir Fabio pour « Mont Blanc », dans la collection La Forêt aux éditions Stock (qui faisait suite à « Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit »). Ici, pour « Apologie du slow » nous retrouvons cette entreprise d’autoportrait sincère, où les rythmes de l’existence se conjuguent avec les fantaisies de l’imaginaire, où l’ensemble des séquences dans leurs diversités, trouve une unité. Il y a, toujours, dans ce nouveau recueil cette capacité à émouvoir, à surprendre, à faire sourire. Ce livre où nous croiserons Godard, Tom Waits, Mondrian, Pasolini et ses ragazzi, le cinéma, les vagabondages et les discussions jusqu’au bout de la nuit est une belle manière de parler du temps, de ces instants particuliers qui laissent une trace si marquante dans nos existence. Désinvolture peut rimer avec allure, ce qui fait de ce recueil un objet rare et touchant, bourré d’énergie.

Aimer fatigue de Philippe Fusaro aux éditions de l’Olivier

Nous allons traverser un été et un automne extraordinaire entre Tanger et Palerme, rencontrer une femme fatale, un grand écrivain en panne d’inspiration, un espion peu habile. L’atmosphère délicate, les déambulations, les phrases tirées de chansons de Christophe, et le rhum coco qui coule à flot font de ce roman un délice de mélancolie et de sophistication simple. « Aimer fatigue » nous parle d’amitiés, de musique et nous entraine du petit au grand socco, du café Hafa au Café de Paris, de bars, de port et de palaces, sur un rythme sensible, dans une atmosphère enfumée où l’ivresse n’est pas qu’alcool, où le rêve se confond avec la réalité. De cette ville mythique, Philippe Fusaro nous donne une vision originale aux charmes subtiles, c’est aussi une réflexion douce sur le deuil, l’amour, le sexe, l’écriture. Tanger ville double, atlantique et méditerranéenne, sur laquelle planent quelques fantômes aguicheurs qui nous entrainent, sous la plume de Philippe Fusaro, vers une histoire complice et plus rock’n’roll que l’on ne pourrait le croire.
Au-delà de ces titres magnifiques, nous pourrions essayer de trouver des points de raccords entre ces deux textes : la présence de la musique, du cinéma, de la littérature entre autres. Cela n’est pas le sujet car, malgré leurs différences de formes, de style, avec des univers diamétralement opposés ces deux livres ont en commun la mémoire et les souvenirs.  Nous sommes toujours à la périphérie de la vie, des rêves ;  le passé y est suspendu, comme des divagations entre le réel et l’imaginaire. Les deux écrivains partagent la même volonté de nous entrainer sur les chemins de la littérature. Ces deux romans forment un ensemble construit avec rigueur où les surprises, les anachronismes, le désir de constance couplé à la fantaisie nous interroge sur un projet : comment faire de l’ordinaire une épopée ?

Pour terminer, une citation de Raymond Roussel dans l’ouvrage de Fabio Viscogliosi « La question n’est peut-être pas tant où aller, mais comment ».

L’Humeur Vagabonde – 43, rue du Poteau – 7518 Paris
La librairie reçoit régulièrement des écrivains