En matière de transfert d’entreprise, la jurisprudence de la Cour de cassation est fluctuante. Deux arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 10 octobre 2006 sont venus préciser les conséquences du refus par le salarié du transfert de son contrat de travail dans deux hypothèses ; d’une part, en cas d’application volontaire de l’article L.122-12 du code du travail et d’autre part, en cas d’application de plein de droit de cette disposition.
Dans la première espèce, la société Kodak-Pathé employait à l’origine plusieurs salariés pour la gestion de ses stocks et la maintenance de son matériel. Un centre européen de distribution a été crée et sa gestion confiée à la société Caterpillar qui s’est vue transférer les contrats de travail de 46 salariés chargés de la distribution des produits. 32 salariés ont alors demandé leur réintégration chez leur employeur d’origine.
La Cour d’appel de Paris a refusé d’accéder à la demande des salariés au motif que ces derniers ne s’étaient pas opposés au transfert de leur contrat de travail puisqu’ils avaient, pendant un an et demi, travaillé pour le nouvel employeur.
La Cour de cassation censure un tel raisonnement au visa de l’article 1134 du code civil. Elle considère en effet que lorsque les conditions de l’article L.122-12 du Code du travail ne sont pas réunies et qu’il s’agit alors d’une application volontaire du transfert d’entreprise, le transfert des contrats de travail en cours et par-là même le changement d’employeur constituent une modification substantielle de leur contrat de travail que les salariés peuvent refuser.
En conséquence, en cas d’application volontaire de l’article L. 122-12 l’employeur doit obtenir l’accord exprès des salariés transférés.
Dans la seconde espèce, il y avait bien transfert d’une entité économique autonome ; les salariés ont donc été transférés de « plein droit », puisque l’article L.122-12 avait vocation à s’appliquer. Dans un tel cas et ce aux termes d’une jurisprudence constante, le salarié ne peut refuser le transfert de son contrat de travail.
La question qui s’est posée en l’espèce était donc de savoir comment l’employeur devait réagir face à un salarié qui persiste dans son attitude de refus du transfert de son contrat de travail alors que celui-ci est automatique et s’impose à lui ?
La Cour de cassation considère que le refus par le salarié du transfert de son contrat de travail pour le compte du nouvel employeur produira les effets d’une démission, si ce refus a été exprimé de façon individuelle.
L’employeur ne peut donc tirer comme conséquence d’une cessation collective du travail (comme c’était le cas en l’espèce) que les salariés ont décidé de refuser le transfert.