Cass. Com. 19 janvier 2016, n°14-21.670

Contexte

Une société exploitant des sites web a saisi l’Autorité de la concurrence d’une demande visant des pratiques discriminatoires et un abus de position dominante de la part d’un moteur de recherche dans le secteur de la publicité en ligne liée aux recherches.

Le moteur de recherche a demandé au rapporteur général de l’Autorité, qu’une partie des pièces de la procédure soient confidentielles, et que seule une version non confidentielle et un résumé desdites pièces soient communiqués aux autres parties, ce qui a été accordé.

La partie saisissante a cherché à obtenir de l’Autorité de la concurrence qu’elle annule cette décision de protection de la confidentialité, ce qui a été rejeté par l’Autorité, puis par la Cour d’appel. La société a alors formé un pourvoi en cassation, arguant que le droit au respect du contradictoire et à un recours effectif devait lui permettre de former une telle demande. Texte de référence

Article L463-4 du code de commerce :

« Sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents est nécessaire à l’exercice des droits de la défense d’une partie mise en cause, le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence peut refuser à une partie la communication ou la consultation de pièces ou de certains éléments contenus dans ces pièces mettant en jeu le secret des affaires d’autres personnes. Dans ce cas, une version non confidentielle et un résumé des pièces ou éléments en cause lui sont accessibles »

Décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation rejette le pourvoi, en estimant que la partie saisissante ne peut faire valoir les droits dont elle se prévaut pour demander la communication des documents confidentiels. Seule une partie mise en cause a un tel droit en application du texte visé ci-dessus.
La Cour précise que :

– « […] le droit des parties de prendre connaissance des pièces remises à l’Autorité n’est pas un droit absolu et illimité et doit être mis en balance avec le droit des entreprises à la protection du secret de leurs affaires ».

« que ni le droit à un recours effectif ni le principe de la contradiction n’impliquent que la partie saisissante, qui n’a pas de droits de la défense à préserver dans le cadre de la procédure ouverte par l’Autorité sur sa saisine, […], puisse obtenir la communication de documents couverts par le secret des affaires concernant la personne qu’elle a mise en cause, ni qu’elle puisse contester la décision de protection du secret des affaires prise à ce titre ».

– L’entreprise ayant saisi l’Autorité n’étant pas une partie « mise en cause », elle ne peut faire valoir de prétendus droits de la défense. Elle ne peut donc ni obtenir les pièces confidentielles, ni même contester la décision qui accorde la confidentialité des pièces.

Conclusion

Cet arrêt est une bonne nouvelles pour les sociétés désireuses de protéger leurs secrets d’affaires dans le cadre de certaines procédures initiées à leur encontre.

En revanche, cela signifie aussi que la saisine de l’Autorité de la concurrence n’est pas la procédure appropriée pour avoir accès aux détails de pratiques suspectes ou suspectées pour mieux pouvoir défendre ses intérêts.
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