Cass. soc. 15 septembre 2010, n°08-43.299
En application des dispositions de l’article L.1225-4 du Code du travail, il résulte qu’ « aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes [al. 1]. Toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressée, non liée à l’état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa [al. 2] ».
Si les possibilités de licencier une salariée enceinte sont strictement encadrées, l’exégèse de l’article L. 1225-4, pris en son dernier alinéa, montre que l’employeur peut, sous certaines conditions de motifs, rompre le contrat de travail de la salariée à la condition que cette rupture ne soit pas effective ou notifiée pendant la période de suspension du contrat de travail [i.e. le congé maternité et le congé pathologique dans certaines limites], à défaut de quoi ledit licenciement est nul.
Jusqu’à présent, les tribunaux permettaient donc à l’employeur de mener l’entretien préalable au licenciement pendant le congé maternité, dès lors que le licenciement était notifié après son expiration (Cass. soc. 5 juillet 1978 n°77-40.1356 & Cass. soc. 11 mai 1993 n° 89-45.857 & 28 juin 1995 n° 92-40.360). La Cour de cassation considérait en effet clairement que « si la résiliation du contrat de travail par l’employeur ne peut prendre effet ou être signifiée pendant la période de suspension liée à la maternité ou à l’adoption, ces dispositions n’interdisent pas à l’employeur d’engager la procédure de licenciement pendant ladite période ».
Par un arrêt du 15 septembre 2010 (n°08-43.299), la chambre sociale de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence et va même plus loin.
En effet, interprétant très largement les termes de l’article L. 1225-4, l’arrêt dispose que l’embauche d’un salarié durant le congé maternité de l’intéressée et qui a pour objet de pourvoir à son remplacement définitif caractérise une mesure préparatoire au licenciement prohibée qui annulerait le licenciement prononcé par la suite.
En l’espèce, à l’issue de son congé maternité, une salariée avait pris quatre semaines de congés et, de retour le 2 janvier 2006, elle avait été convoquée à un entretien préalable le 4 janvier suivant, son licenciement pour insuffisance professionnelle lui ayant été notifié le 27 janvier 2006.
L’entretien préalable au licenciement n’avait donc pas eu lieu pendant le congé maternité.
Cependant, la Salariée reprochait à son employeur d’avoir, durant son congé maternité, embauché définitivement un salarié pour la remplacer. Elle en concluait que la société avait, pendant son congé maternité, préparé son licenciement, alors que pendant la suspension de son contrat, elle était protégée contre toute mesure de licenciement de manière absolue.
Bien que la lecture, par la salariée, des dispositions légales la protégeant pendant son congé maternité, était quelque peu extensive, ces dernières ne prohibant strictement que la prise d’effet ou la notification du licenciement pendant ledit congé, la Cour de cassation a entendu son argumentation et considéré que les juges du 2nd degré auraient dû rechercher si l’engagement d’un salarié pendant le congé maternité de l’intéressée n’avait pas pour eu objet de pourvoir définitivement à son remplacement, ce qui aurait caractérisé une mesure préparatoire interdite.
Devant la Cour d’appel de renvoi, la salariée devra donc établir que la personne a été définitivement engagée (i.e. en CDI) pour la remplacer (i.e. uniquement pour pourvoir à ses fonctions).
Il en résulte donc qu’outre les interdictions formulées de manière très claire par l’article L. 1224-4 du Code du travail, le juge y ajoute l’interdiction absolue de préparer le licenciement de la salariée pendant son congé maternité, cette préparation étant considéré de manière très extensive.
En effet, dans le cas de l’espèce jugée, la salariée n’avait été convoquée à un entretien préalable qu’après son congé, l’employeur n’ayant fait, pendant le dit congé, et sous réserve que la salariée en rapporte la preuve, qu’organiser son remplacement définitif.