Dans la saga des décisions "Google" ayant trait aux liens sponsorisés, la dernière en date est celle de la Cour d’appel de Versailles, qui vient à nouveau de condamner le célèbre moteur de recherche pour contrefaçon de marque, comme l’avaient fait auparavant de façon quasi systématique plusieurs autres, et ce, malgré la récente remise en cause de ces solutions par les TGI de Paris et de Nice (TGI Paris, 3e ch., 8/12/05 et TGI Nice, 3e ch., 7/02/06 TWD Industries / Google France et Google Inc.)

Cette espèce concerne à nouveau le service d’offre de liens sponsorisés proposé par Google ("Adwords") :celui-ci permet aux annonceurs de réserver des mots clé en rapport avec leur activité, afin qu’un lien hypertexte renvoyant vers leur site Internet apparaisse à l’écran quand un internaute tape ledit mot clé dans sa requête initiale. La difficulté juridique soulevée par ce système est sa conformité au droit des marques notamment, dès lors que le mot clé consiste en une marque déposée.

En l’occurrence, et comme dans les litiges précédents, la demanderesse avait constaté qu’en tapant le nom de sa propre marque dans le moteur de recherche, apparaissaient outre l’adresse de son site électronique, des liens commerciaux renvoyant à des sites concurrents du sien.

Contredisant l’argumentation de la société Google qui, se retranchant derrière son rôle de "prestataire de stockage au sens de la Loi pour la Confiance dans l’économie numérique", soutenait qu’elle n’était pas responsable du contenu des liens commerciaux, la Cour d’appel de Versailles a confirmé la décision du TGI de Nanterre et l’a condamnée pour contrefaçon de marque. Selon la Cour, "i[la contrefaçon de marque résidait en l’espèce non dans l’utilisation d’un terme ayant en apparence une signification purement abstraite et déconnectée de tout contexte, mais dans la reproduction ou l’imitation du mot composant la marque [de la plaignante], en tant qu’elle sert à la publicité d’un concurrent de cette marque]i".

Une telle solution vient directement contredire un autre mouvement jurisprudentiel, celui des TGI de Paris et de Nice, qui considèrent quant eux que seul l’annonceur peut, dans ces hypothèses, être condamné pour contrefaçon de marque, à l’exclusion du fournisseur de liens sponsorisés dès lors que ce dernier ne choisit pas lui-même les mots clé et que son activité (référencement publicitaire) n’est pas couverte par les marques invoquées (application du principe de spécialité).

Selon le TGI de Paris, le moteur de recherche peut en revanche éventuellement être poursuivi sur le fondement de l’article 1382 du Code civil s’il a suggéré à l’annonceur les mots clé litigieux.

Il existe donc actuellement une incertitude sur la responsabilité des moteurs de recherche au regard du droit des marques, dans le cadre d’offres de liens sponsorisés contrefaisant des marques. En revanche, la responsabilité des annonceurs est systématiquement retenue par les juges.