La fiducie a connu dans les derniers mois trois importantes réformes qui en font un nouvel instrument pratique de notre paysage juridique.

Introduite par la loi du 19 février 2007 dans le Code Civil (articles 2011 et suivants), la fiducie est « l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires ».

Si la fiducie ne peut être constituée dans une intention libérale (nullité d’ordre public de l’article 2013 C. civ.), elle peut être un instrument de gestion patrimoniale ou une nouvelle sûreté.

La loi LME a étendu le champ d’application de la fiducie, notamment en permettant aux personnes physiques ou aux entrepreneurs individuels d’être constituant (abrogation de l’article 2014 C. civ.) et aux avocats d’être fiduciaires (article 2015 C. civ.) aux côtés des établissements de crédit, des établissements et services autorisés à effectuer des opérations de banque, des entreprises d’investissements et des entreprises d’assurance.

La durée de la fiducie, limitée à l’origine à trente ans, a été étendue à 99 ans (article 2018 C. civ.), par analogie avec la durée des sociétés.

La cession de créance réalisée dans le cadre d’une fiducie est également rendue opposable aux tiers à la date du contrat de fiducie ou de l’avenant qui la constate, mais ne devient opposable au débiteur de la créance qu’à compter de la notification par le cédant ou le fiduciaire (article 2018-2 C. civ.).

Malgré ces précisions, après la loi LME du 4 août 2008, des doutes subsistaient quant à la réelle efficacité de la fiducie-sûreté, notamment en cas de procédure collective.

C’est pourquoi, l’ordonnance du 18 décembre 2008 a apporté des réponses de principe relatives à tous les types de fiducie, en disposant :

– que le contrat de fiducie est expressément exclu des dispositions régissant les contrats en cours ;

– que, sauf exceptions, le sort de la fiducie en cas d’ouverture d’une procédure collective touchant le constituant, peut être réglé par le contrat de fiducie ;

– que la liquidation judiciaire d’un débiteur, qui serait constituant et bénéficiaire, entraîne de plein droit la résiliation du contrat de fiducie et fait donc retourner les actifs fiduciaires dans le patrimoine du débiteur.

Dans ce contexte de procédure collective, le bénéficiaire de la fiducie devra déclarer sa créance et revendiquer les actifs fiduciaires éventuellement restés entre les mains du constituant, pour s’assurer de la conservation de ses droits.

En cas de liquidation judiciaire du constituant, la fiducie-sûreté conservera les effets contractuels que les parties lui ont donnés et le créancier pourra s’approprier ou réaliser les actifs fiduciaires à son bénéfice, sans se voir opposer les dispositions d’un éventuel plan de cession.

En cas de sauvegarde ou de redressement judiciaire, l’effet de la fiducie sera différent selon que le constituant aura toujours les actifs fiduciaires à sa disposition.

Si des actifs ont été laissés à la disposition du débiteur, l’administrateur aura la faculté d’opposer au bénéficiaire la continuation de la mise à disposition des actifs fiduciaires (régime des contrats en cours).

Si des actifs n’ont pas été laissés à la disposition du débiteur, la fiducie conservera son plein effet et le créancier pourra s’approprier ou réaliser ces actifs à son bénéfice.

Dans ce dernier cas, pour éviter la perte d’actifs utiles à la poursuite de son activité, le débiteur a la possibilité de payer intégralement le bénéficiaire, ce qui lui permettra de récupérer les actifs fiduciaires (article L.622-7-II du Code de Commerce).

Enfin, nous n’évoquerons que deux traits principaux de l’ordonnance du 30 janvier 2009, à savoir :

– la possibilité de céder la propriété d’un bien mobilier et d’un droit à titre de garantie d’une obligation en vertu d’un contrat de fiducie (article 2372-1 et suivants) ;

– le mécanisme du rechargement de la fiducie, par lequel le constituant peut affecter une partie de la valeur de l’actif transféré dans le patrimoine fiduciaire à la garantie d’une autre créance que celle initialement prévue, quand celle-ci aura pu être remboursée ou quand la valeur de l’actif est supérieure à la créance initiale.

Enfin, les règles applicables à l’avocat fiduciaire ont également été précisées et feront l’objet d’un prochain article. Notons que ces règles seront affinées une fois que les autorités professionnelles auront pris une position définitive sur les conditions d’exercice de l’activité de fiduciaire par les avocats.