CAA Versailles, 22 novembre 2012, n°11VE02364

La Cour administrative d’appel de Versailles, par un arrêt rendu le 22 novembre 2012, a rappelé que les revenus des joueurs de Poker « professionnels » issus de jeux d’argent sont soumis à l’impôt sur le revenu et qu’ils doivent être déclarés.

L’article 92 du Code Général des Impôts prévoit que sont considérés comme provenant de l’exercice d’une profession non commerciale ou comme revenu assimilé aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n’ont pas la qualité de commerçant et de toute occupation, exploitation lucrative et source de profit qui ne se rattachent pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus.

En principe, le fait de participer à des jeux de hasard et d’en tirer une rémunération ne rentre pas, au sens de l’article 92 du Code Général des Impôts, dans la définition d’une « occupation lucrative ou d’une source de profit ».

Pour autant, le Poker ne saurait être regardé comme un jeu de pur hasard dans lequel seul l’aléa permettrait de remporter des gains, dès lors que l’habilité et la stratégie par la pratique de ce jeu sont nécessaires pour accroître de façon importante la probabilité de percevoir des gains et d’augmenter leur montant.

En l’espèce, un joueur avait perçu des gains d’un montant mensuel de l’ordre de 3.500 € provenant de la pratique habituelle du jeu de Poker dans les casinos et cercles de jeux parisiens entre 2002 et 2004 ; l’Administration a considéré que ce joueur devait être regardé comme ayant exercé une activité lucrative de joueur de Poker professionnel lui procurant des gains réguliers imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux de l’article 92 du Code Général des Impôts.

Le joueur devait donc déclarer des revenus et payer des impôts à l’État au titre des gains de jeux engrangés.

On précisera, et ceci est important, qu’au cas d’espèce, une majoration de 80 % du montant des sommes dues par le joueur a été appliquée, dans la mesure où cette activité était qualifiée d’occulte.

Au-delà de la confirmation d’un principe bien établi, cet arrêt apporte plusieurs indications quant au traitement des joueurs.

En premier lieu, le montant des sommes gagnées ne doit pas être extrêmement important pour déclencher la qualification de joueur professionnel ; en effet, on évoque le plus souvent les joueurs ayant gagné des sommes de l’ordre de 200.000 euros, 500.000 euros ou même plusieurs millions d’Euros par an pour les identifier comme joueurs « professionnels ». L’arrêt nous démontre qu’il n’en est rien et qu’un gain sur 3 ans de 3.500 €/mois suffit à démontrer le fait que le joueur est dit « professionnel » (3.500 * 12 * 3 = 126.000 euros ou 42.000 euros / an).

En second lieu, on notera le montant extrêmement important de la majoration retenue par l’Administration, ce qui doit inviter les joueurs professionnels à la plus grande prudence et à se faire conseiller au plus tôt lorsqu’ils commencent à engranger des gains.