Cass, 16 février 2010, n°09-11968 09-65440
La Cour de cassation a cassé et annulé le 16 février 2010 l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 4 février 2009 dans l’affaire concernant l’exclusivité de l’iPhone.
On se souviendra que le Conseil de la concurrence (devenu l’Autorité de la concurrence), avait in extremis avant Noël 2008, ordonné la suspension à titre conservatoire de la clause d’exclusivité qui liait Apple et Orange pour la vente de l’iPhone en France (Conseil de la concurrence 08-MC-01 du 17 décembre 2008). L’Autorité, approuvée ensuite par la Cour d’appel de Paris, avait notamment considéré que la clause d’exclusivité était d’une durée exceptionnellement longue (5 ans) au regard de la pratique sur le marché.
Deux moyens viennent soutenir la décision de cassation.
La Cour de cassation précise en premier lieu que les juges d’appel auraient dû rechercher, comme ils y était invités, si l’existence de terminaux concurrents de l’iPhone, nouvel entrant sur le marché des « smartphones », n’était pas de nature à permettre aux opérateurs de téléphonie mobile concurrents d’Orange, de proposer aux consommateurs des offres de services de téléphonie et internet haut débit mobiles associées à des terminaux, concurrentes de celles proposées par Orange avec l’iPhone.
La Cour d’appel (et à travers elle, l’Autorité de la concurrence) est donc critiquée pour son manque de rigueur dans l’analyse menée : il n’était pas suffisant d’affirmer le caractère attractif dudit produit.
La Cour de cassation condamne par ailleurs l’insuffisance de motivation concernant la prétendue disproportion entre la durée de l’exclusivité et les investissements consentis. Selon la Cour, le raisonnement de la Cour d’appel présuppose que, sans cette période d’exclusivité, Orange n’aurait pas pu conserver ou gagner tout ou partie des clients utilisateurs d’iPhone.
Les juges de la Cour suprême ont considéré que, en prenant en considération la totalité du chiffre d’affaires généré par les communications des acheteurs d’iPhone comme preuve d’un retour rapide sur investissement, sans vérifier notamment si Orange aurait pu, en tout état de cause, conserver ou acquérir tout ou partie des clients de l’iPhone, la Cour d’appel a commis une erreur de raisonnement.
Selon la Cour de cassation en effet, seule une partie de ce chiffre d’affaires (un revenu additionnel) aurait dû être prise en compte pour évaluer la proportionnalité de la durée de l’exclusivité au regard des investissements consentis.
Les parties sont donc dans l’état préalable à l’arrêt cassé. L’affaire a été renvoyée devant la même Cour d’appel, autrement composée, pour être à nouveau jugée. Il semblerait cependant que cette procédure ne soit pas suivie. En effet, l’opérateur qui a entamé une procédure d’engagement avec l’Autorité de la concurrence, ne donnera pas suite. En pratique, cette décision n’aura donc aucun impact, Apple et Orange (France Télécom) ayant d’ores et déjà renoncé en novembre 2009 à réserver la commercialisation de la version courante de l’iPhone à un partenaire exclusif en France.