Cass. Soc., 3 février 2010, n°08-41.412
En l’absence de dispositions légales, les règles relatives à la mutation du salarié ont été définies par la jurisprudence. Ainsi, la Cour de cassation considère qu’en l’absence de clause contractuelle de mobilité, le changement de lieu de travail, dans un secteur différent de celui où travaille le salarié constitue, en principe, une modification du contrat de travail nécessitant l’accord de ce dernier (Cass. Soc., 20 octobre 1998, n°96-40.757).
La jurisprudence a eu l’occasion de préciser le régime particulier encadrant la mutation temporaire du salarié (Cass. Soc., 22 janvier juin 2003, n°00-43.826 et Cass. Soc., 15 mars 2006, n°04-47.368).
Jusqu’à présent, la mutation temporaire ou occasionnelle du salarié pouvait s’effectuer, en dehors du secteur géographique, sans constituer une modification du contrat de travail, dès lors que :
• la mesure était justifiée par l’intérêt de l’entreprise,
• les fonctions spécifiques du salarié impliquaient une certaine mobilité de ce dernier,
• un délai de prévenance « suffisant » était respecté par l’employeur.
Par un arrêt du 03 février 2010, la Cour de cassation a modifié ce régime.
Dorénavant, la mobilité temporaire du salarié ne constituera pas une modification du contrat de travail si et seulement si trois conditions cumulatives sont remplies.
• Tout d’abord, la nouvelle affectation temporaire du salarié doit être motivée par l’intérêt de l’entreprise.
• Ensuite, elle doit être justifiée par des circonstances exceptionnelles.
• Enfin, le salarié doit avoir été informé préalablement et dans un délai raisonnable du caractère temporaire de sa nouvelle affectation ainsi que de sa durée prévisible.
La Cour de cassation a précisé que le nouveau régime de la mobilité temporaire s’appliquait également, en présence d’une clause de mobilité, dans le cas où l’affectation du salarié s’effectuerait au-delà des limites prévues par celle-ci.
En l’espèce, la salariée avait fait l’objet d’un licenciement pour faute grave parce qu’elle avait refusé sa nouvelle affectation temporaire, laquelle lui avait été notifiée deux jours avant sa prise d’effet et sans précision aucune quant à sa durée.
La Cour de cassation a considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que, au regard de l’information « brutale » et incomplète dont avait fait l’objet la salariée, la mutation temporaire devait s’analyser en une modification du contrat de travail nécessitant l’accord de cette dernière.
Ainsi, en pratique, en cas de mutation temporaire sur un nouveau secteur géographique ou dans une zone non couverte par une clause de mobilité, l’employeur ne pourra plus se contenter d’informer préalablement le salarié. Il devra également lui indiquer avec précision la durée de la nouvelle affectation ou en préciser, à tout le moins, la durée prévisible.
Par ailleurs, la Cour de cassation semble abandonner le critère relatif aux fonctions inhérentes du salarié. A dessin ou non…? Les futurs arrêts nous apporteront, sans doute, un éclairage sur cette question qui demeure ouverte.