Les faits

CE, 10ème – 9ème ch. réunies, n° 386525 8 juin 2016

Les ayants droits d’une personne décédée ont demandé à son employeur, en l’occurrence la Banque de France, la communication du relevé des appels téléphonique passés par la défunte sur une période d’un mois depuis sa ligne professionnelle, dans le but de déterminer le nombre et la durée des échanges qu’elle avait eus avec le corps médical avant son décès.

La Banque de France ayant refusé, les héritiers ont déposé plainte auprès de la CNIL, qui n’a pas donné suite à leur demande. Ils ont alors introduit un recours pour excès de pouvoir contre la décision de la CNIL.

La décision

Le Conseil d’État a rappelé qu’au titre de la loi Informatique et Libertés :

– La « personne concernée par un traitement de données à caractère personnel est celle à laquelle se rapportent les données qui font l’objet du traitement »  (article 2)

– C’est la personne concerné qui peut demander, sous réserve de justifier de son identité « […] la communication, sous une forme accessible, des données à caractère personnel qui la concernent […] » (article 39- 4°)

Il a jugé « qu’il résulte de ces dispositions qu’elles ne prévoient la communication des données à caractère personnel qu’à la personne concernée par ces données » et non aux héritiers.

Perspectives et enjeux

Le nouveau Règlement européen, RGPD, ne s’applique pas aux données de personnes décédées et ne devrait donc pas influer sur cette jurisprudence. Il renvoi sur cette question à la règlementation des États membres.

En l’occurrence le projet de loi pour une République numérique (dit « loi Lemaire ») traite de cette question en prévoyant que la personne concernée peut donner des « directives relatives à la conservation, à l’effacement et à la communication de ses données à caractère personnel après son décès ».[2]

Pour autant cela ne couvre pas la question du droit des héritiers. Il y a des situations où les données d’une personne décédée, et par exemple des informations génétiques ou médicales, peuvent être d’une importance vitale pour les héritiers. Que dire aussi du droit à objecter à un traitement ou droit à l’oubli : doit-il disparaitre au décès de la personne (directement) concernée, indépendamment de l’impact que cela peut avoir sur les droits et libertés des héritiers ?  Cela mérite réflexion.
  Contact : stephanie.faber@squirepb.com  


[1] Considérant 27 du RÈGLEMENT (UE) 2016/679 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) [2] Projet d’article 40-1 de la Loi Informatique et Libertés