Cass. soc. 10 mai 2016, n°14-27.953
Il a déjà été jugé que lorsque le licenciement économique est dénué de cause réelle et sérieuse, le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) est privé de cause. L’employeur doit alors verser au salarié, si ce dernier le demande, outre l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’indemnité de préavis et les congés payés afférents qu’il aurait dû percevoir s’il n’avait pas adhéré au CSP.
Par arrêt du 10 mai 2016 (n°14-27.953), la chambre sociale de la Cour de cassation précise que l’employeur ne peut pas déduire les sommes qu’il a versées à Pôle Emploi au titre de sa participation au financement du dispositif du CSP, équivalent à l’indemnité de préavis, limitée à 3 mois, augmenté des charges sociales patronales. Il est seulement autorisé à déduire des sommes qu’il doit au salarié, ce qu’il lui a déjà versé au titre de l’excédent du préavis et des congés payés y afférent.
Sans grande surprise, la Cour de cassation transpose aux conséquences de l’absence de cause réelle et sérieuse, sa jurisprudence établie à propos de l’ancêtre du CSP, la convention de reclassement personnalisé (CRP) qui était en vigueur jusqu’en août 2011 (Cass. soc., 5 mai 2010, nº 08-43.652).
Pôle Emploi y trouve son compte puisqu’il conserve ainsi les sommes que lui a versées l’employeur pour participer au financement du CSP dont a bénéficié le salarié licencié.
Le salarié y trouve également son compte puisqu’il bénéficie du dispositif du CSP mais également de l’intégralité de l’indemnité compensatrice de préavis non exécuté et des congés y afférents alors que son licenciement économique est jugé sans cause réelle et sérieuse.
L’employeur reste quant à lui sur le banc de touche puisqu’il peut ainsi être doublement condamné (1) à ne pas pouvoir récupérer les sommes versées à Pôle Emploi et (2) à payer un préavis et les congés pays y afférents au salarié qui ne l’a pas exécuté.
Une partie de la doctrine considère qu’il est légitime que le salarié soit rétabli dans son droit à l’indemnité compensatrice de préavis au titre d’un CSP auquel il n’aurait pas dû adhérer lorsque son licenciement économique est jugé sans cause réelle et sérieuse.
Si nous suivons cette logique jusqu’au bout, les décisions de justice intervenant généralement postérieurement à la fin de prise en charge par le Pôle Emploi du salarié au titre du CSP, le salarié dont le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse devrait donc à tout le moins rembourser à Pôle emploi le différentiel entre l’Allocation de Sécurisation Professionnelle qu’il a indûment perçu et l’Allocation de Retour à l’Emploi. Si la décision de justice intervient (sous réserve qu’elle soit définitive) avant la fin de prise en charge, le salarié devrait également sortir du dispositif de CSP. Pôle Emploi devrait quant à lui rembourser à l’employeur les sommes versées à tort.
Cependant cette logique n’est pas appliquée…. l’appréciation de la question de légitimité est donc ici, comme souvent, une question de point de vue !
Cet article a été écrit par Cristelle Devergies-Bouron