La place de l’avocat du demandeur dans un recours en annulation porté devant la Cour d’appel de Paris est des plus délicates. La portée du contrôle est tellement restrictive que les chances de succès sont de l’ordre de 5%.

La récente jurisprudence correspond aux statistiques. On sait à quel point le contrôle de la sentence est entendu de façon stricte. La Cour dans ses derniers arrêts ne déroge pas à ses principes et rappelle notamment que tout grief formulé à l’encontre de la sentence ne peut être examiné s’il n’a pas été soulevé devant le Tribunal arbitral. Il est donc essentiel de protester et de faire inscrire sa protestation pour tout grief procédural ou de fond pendant la procédure d’arbitrage (CA Paris 7 mai 2009, jurisdata 2009-378250, CA Paris 10 septembre 2009).

Dans une affaire jugée le 10 septembre 2009, il avait été soumis à la Cour d’appel de Paris une problématique originale. Dans une ordonnance, l’arbitre unique avait indiqué que les audiences seraient enregistrées et que les retranscriptions seraient ensuite remises aux parties. Les audiences ont bien été enregistrées, les cassettes ont été remises à la fois à la CCI et à l’arbitre. Les parties en revanche n’ont jamais reçu les enregistrements. L’affaire est clôturée dans une certaine confusion sans que les parties aient jamais eu accès aux enregistrements.

Outre qu’elle constitue une violation d’une ordonnance procédurale de l’arbitre, l’absence de remise des enregistrements constitue, à n’en pas douter, une atteinte aux droits des deux parties dans la mesure où :

• Ils n’ont pas pu vérifier les témoignages oraux effectués pour la première fois à l’audience et les commenter pour en relever les éventuelles contradictions et les erreurs.

• La preuve des contestations qui ont été faites par les parties à l’audience a disparue.

• L’arbitre a eu accès à des éléments pour rédiger la sentence qui n’ont pas été soumis au débat contradictoire, que les parties n’ont pas eus.

• Et surtout les deux parties comptaient sur la remise des retranscriptions après l’audience ; dès lors leur attitude à l’audience aurait été différente s’ils n’avaient pas eu cette assurance.

La Cour cependant utilise à nouveau cet argument imparable : les parties auraient dû et auraient pu s’en plaindre avant la date de clôture de l’affaire et dès lors la Cour refuse d’examiner ce grief.

Quelle que soit la légitimité de cette décision au regard des faits, les parties à un arbitrage pourraient s’inquiéter de ce qu’une atteinte manifeste aux droits de la défense ne soit pas examinée de plus près par la Cour d’appel de Paris.

Le caractère extrêmement réduit de son contrôle est réputé et pourrait à terme nuire au choix de Paris comme place d’arbitrage, même si l’étroitesse du contrôle est conforme au principe de l’autonomie de l’arbitrage.