La Commission européenne a adopté le 30 juin 2008 un règlement introduisant la procédure de transaction en droit communautaire de la concurrence . (Règlement (CE) n° 622/2008 modifiant le règlement (CE) n° 773/2004).

Comme cela a été le cas en France et dans de nombreux autres pays ayant mis en place une telle procédure, l’objectif principal de la Commission est d’améliorer l’efficacité de son action à l’encontre des cartels, en accélérant le traitement de certaines affaires afin de pouvoir concentrer plus de moyens (humains et logistiques) sur des affaires plus complexes (et souvent plus graves).

Bien qu’ils possèdent de nombreux points communs, le mécanisme communautaire de transaction et le mécanisme français de non-contestation des griefs et d’acceptation d’engagements diffèrent sensiblement.

Tout d’abord, contrairement à ce qui est le cas en droit français, le système communautaire ne concerne que les affaires d’entente, là où le système français est plus flexible et peut s’adapter aux pratiques unilatérales (abus de domination).

Sur le plan procédural, même si le projet final inclut diverses améliorations par rapport au projet initial, le règlement communautaire accorde à la Commission un large pouvoir d’appréciation pour choisir les affaires susceptibles de bénéficier de la transaction.

Ainsi, la Commission peut décider d’entamer des discussions ou d’y mettre fin à tout stade de la procédure. Elle peut également conditionner le bénéfice de la transaction à l’acceptation par les parties d’un certain nombre de restrictions, et notamment :

– la rédaction d’une notification des griefs simplifiée,

– la simplification de la procédure (langue unique par exemple),

– la limitation du nombre de conseils représentants les parties impliquées dans la transaction, ou encore

– la rédaction d’une décision simplifiée.

Ce dernier point n’est pas sans susciter quelques interrogations, notamment concernant l’utilité de la décision pour des tiers victimes des pratiques de l’entente qui souhaiteraient par la suite pouvoir utiliser la décision de la Commission afin d’obtenir réparation devant les juridictions de droit commun.

Bien que les plaignants soient, selon les termes du règlement « étroitement associés » à la procédure de transaction, la Commission ne souhaite pas décourager les entreprises à coopérer pleinement. Aussi, tant le règlement 622/2008 que la communication de la Commission (Communication de la Commission relative aux procédures de transaction engagées en vue de l’adoption des décisions en vertu des articles 7 et 23 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil dans les affaires d’entente) prévoient que la Commission n’aura aucune obligation à fournir aux plaignants une version non-confidentielle de la communication des griefs.

Le transfert des informations aux autorités des Etats membres dans le cadre du réseau des autorités européennes de concurrence, ne devrait se faire que sous réserve de garanties fournies aux parties contre la divulgation.

La principale interrogation qui subsistera pour les entreprises impliquées dans une entente, demeurera en tout état de cause celle de l’intérêt ou non, à transiger. A cet égard, le fait que le règlement communautaire prévoie une réduction limitée à 10% du montant de l’amende à infliger peut laisser perplexe.

Il est intéressant de souligner qu’en France, en cas de non-contestation des griefs, le montant de l’amende maximal est automatiquement réduit de moitié, et en outre, si les engagements pris dans le cadre de la procédure de non-contestation le justifient, les entreprises peuvent bénéficier d’une réduction du montant de l’amende de 10 à 30%.

Contrairement à la procédure de non-contestation des griefs, le « règlement direct » communautaire implique une reconnaissance par l’entreprise de sa responsabilité dans le cartel. La procédure adoptée semble se rapprocher davantage du plea bargaining du droit américain que des modèles européens.

Dans un système où la Commission concentre les fonctions d’enquête et de jugement, cela n’est pas sans soulever quelques préoccupations, notamment en matière de respect des droits de la défense. Aux Etats-Unis, en effet, c’est le juge qui a le dernier mot en matière de transaction.