Avant la réforme, en 1998, du droit de l’arbitrage au Sénégal, le Code de procédure civile contenait des dispositions lacunaires en la matière. Les vingt six articles du Livre VI, intitulé « des arbitrages », reconnaissait la convention d’arbitrage mais ne faisait nullement référence à la clause compromissoire.

Par ailleurs, il convenait de mettre fin au monopole géographique dans le cadre duquel, toutes les procédures d’arbitrage opposant une entreprise africaine à une entreprise européenne se déroulaient en Europe, quand bien même le litige portait sur un contrat soumis au droit de l’entreprise africaine.

Notons également que le Sénégal a ratifié la Convention pour le règlement des différents relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants d’autres Etats (CIRDI) et a également adhéré à la Convention de New York du 10 Juin 1958 pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères.

Une réforme du droit de l’arbitrage ne pouvait être que favorablement accueillie. Comme le précise la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Dakar, le recours à l’arbitrage permet de bénéficier de la souplesse et de la discrétion de la procédure, de l’expertise des arbitres et constitue surtout la solution à la surcharge des tribunaux.

Le Sénégal a entamé sa réforme de la procédure civile en affirmant une réelle volonté de promouvoir l’arbitrage, en tant que mode alternatif de règlement des litiges, offrant ainsi un cadre très favorable à son développement.

La loi n° 98-30 du 14 avril 1998 sur l’arbitrage ajoute un Livre VII à la deuxième partie du Code des obligations civiles et commerciales. Elle est complétée par les décrets n° 98-492 du 5 juin 1998 relatif à l’arbitrage interne et international et n° 98-493 du 5 juin 1998 relatif à la création d’institutions d’arbitrage. Le Centre d’arbitrage, de médiation et de conciliation de Dakar (CAMC), fonctionnant sur le modèle du CMAP de Paris dont il s’inspire, a été crée par la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Dakar à l’issu de réflexions avec le Comité de réforme. Ce type d’institution existe dans la plupart des pays membres de l’OHADA.
Les nouvelles dispositions sont principalement calquées sur le Code de procédure civile français et sur la loi CNUDCI. Ainsi, les articles 795 à 820 du Code de procédure civile sénégalais s’inspirent très largement des articles 1442 à 1491 du nouveau Code de procédure civile français.

On notera également qu’une place prééminente est faite aux institutions permanentes d’arbitrage. Une partie de la doctrine considère qu’il peut s’agir d’une anticipation à la mise en place d’une Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) par le Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique. Sur la CCJA, voir « La Cour commune de Justice et d’Arbitrage dans le contexte de l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ».

Cette réforme du droit interne de l’arbitrage a été suivie par l’élaboration de l’acte Uniforme (Ohada) relatif à l’arbitrage. Le Sénégal étant membre de l’OHADA, se pose la question de l’articulation des deux normes dans la pratique. Il convient alors de noter qu’en cas de conflit les textes de l’OHADA abrogent et remplacent les dispositions nationales et bénéficient de la primauté.

Un certain nombre de dispositions convergent. A titre illustratif, le droit sénégalais ainsi que l’article 4 de l’Acte uniforme reconnaissent l’autonomie de la clause compromissoire.

Mais, si l’on retient que l’exécution d’une sentence dans un Etat de l’OHADA requiert l’autorisation dudit Etat (Cf. article de la revue précité), d’autres dispositions posent une indispensable interprétation des textes de l’OHADA au regard du droit interne des pays signataires. Ainsi, les textes OHADA semblent admettre l’arbitrabilité en matière civile et commerciale tandis que la majorité des Etats ne l’admettent pas pour les matières concernant l’état et la capacité des personnes. Ainsi, l’article 826-2 du code des obligations civiles et commerciales sénégalais maintient le champ classique de l’arbitrage car il prévoit que l’on ne peut pas compromettre « sur les dons et legs d’aliments, logements et vêtements, sur les séparations d’entre mari et femme, divorcés, questions d’état, et plus généralement sur les matières qui intéressent l’ordre public ». Or, selon l’article 2 de l’Acte Uniforme, « toute personne physique ou morale peut recourir à l’arbitrage sur les droits dont elle a la libre disposition ».

En tout état de cause, le droit OHADA a le mérite de mettre fin à l’impossibilité pour les personnes publiques de recourir à l’arbitrage lorsque celles-ci sont parties en tant que distributeurs ou producteurs et en conformité avec l’ordre public interne et international. Il convient de relever que les domaines qui concernent le droit administratif sont exclus puisque ce dernier n’a pas fait l’objet d’harmonisation par le législateur OHADA. Cette mise à niveau du cadre institutionnel et législatif avec les standards internationaux a contribué à l’amélioration du cadre juridique des affaires au Sénégal.