Entre 1920 et 1970, l’amplitude du prix du pétrole (littéralement : « huile de pierre » – du latin « petra » et « oleum ») a été contenue. Le baril (42 gallons américains ou 159 litres) valait alors environ … 5 dollars l ! En 1973, après la crise de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP), le prix du pétrole flambe : 10 dollars, puis 20, puis 40 dollars … Il atteint 50 dollars au cours de l’été 2004. Moins de quatre ans plus tard, les prix sont doublés !
La barre des 135 dollars vient d’être franchie en ce mois de mai 2008… Et la question n’est plus de savoir si le prix du baril va atteindre 200 dollars, mais, plus simplement quand ?
Après la crise de 1973, les pouvoirs publics avaient mis en place un système dérogatoire pour compenser, par des règles originales, le préjudice financier supporté par les entreprises de construction qui s’étaient engagées, à la faveur de prix réputés constants dans le temps, à construire un immeuble, une route ou un ouvrage d’art au moyen d’un prix ferme et non révisable valable pour toute la durée des travaux.
Le système de compensation était simple : Il s’agissait alors d’extraire du prix ferme et non révisable, consenti sur la base de conditions économiques bouleversées, la part des composants pétroliers et de leurs dérivés, pour accorder de manière limitée à cette assiette de « produits dérogatoires » un régime de révision comparable à celui des marchés de travaux stipulés à prix révisables.
Ce système aurait vocation à être reconduit.
Face à la flambée du prix du baril de pétrole, et alors que les marins-pêcheurs, les agriculteurs et les routiers s’interrogent sur le devenir de leurs activités économiques, les inquiétudes des professionnels de la construction sont susceptibles, elles aussi, de se transformer en revendications.
La structure des prix de la construction, à l’aune de la composition – présumée fidèle – des seuls index BT et TP, laisse apparaître, en effet, une importante part, directe ou indirecte, de produits pétroliers, puisque cette part peut atteindre près de la moitié du prix total du marché dans le cas de travaux d’enrobés. (cf. tableau en annexe)
En marchés publics de travaux, seul un bouleversement dans l’économie du contrat, sera de nature à ouvrir droit à une indemnité – rarement attribuée à ce jour – sur le fondement de l’augmentation du prix des produits pétroliers (voir en ce sens Conseil d’Etat statuant au contentieux, arrêt n° 10170-13920, du 29 avril 1981, Inédit au recueil Lebon).
Pour les marchés privés de travaux, totalement étrangers à la théorie administrative rappelée ci-avant, la seule voie de salut résidera dans la négociation et la signature, en cours de travaux, d’un avenant (voir article 3.2.2 de la norme NF P 03-001 de décembre 2000 et article 1.4.24 de la norme NF P 03-002 de mai 1992) dont l’objet pourrait être l’introduction, dans le marché de travaux, d’une formule classique de révision de prix.
Une réponse existe cependant pour éviter le contentieux, en marchés publics ou le conflit qui ne manquera pas de s’élever, en marchés privés, à l’occasion d’une tentative de renégociation des prix du marché de travaux par suite de l’augmentation des prix pétroliers.
Cette réponse est simple : bannir, par ces temps de marchés financiers particulièrement troublés, les marchés à prix non révisables.
Les maîtres d’ouvrage en payant un prix plus juste pourraient exiger une plus juste qualité en retour, les maîtres d’œuvre, dans la direction et le contrôle du coût des travaux, y gagneraient en sérénité et les entrepreneurs, sans avoir à réclamer, pourraient prétendre à recevoir l’ensemble des sommes qui leur sont dues au titre du marché exécuté, alors, à la totale satisfaction de tous… sauf peut-être des locataires !
Que ces derniers ne s’inquiète pas outre mesure, toutefois, le marché immobilier, en hausse ces dernières années, semble être, d’après les dernières constatations, en phase de retournement.