Cass., Com., 15 octobre 2015, n°14-17.964
L’article 2313 du Code civil dispose :
« La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette ; Mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur ».
Dans son célèbre arrêt du 14 février 2003, la Chambre mixte de la Cour de cassation, mettant fin à une divergence d’interprétation entre les deux premières chambres civiles, a jugé que :
« La clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent »[1].
Lorsqu’une clause de conciliation préalable est insérée dans un contrat de prêt, l’exception tirée de sa violation est-elle purement personnelle au débiteur ou inhérente à la dette de telle sorte qu’elle pourrait être opposée par la caution ? C’est la question tranchée par la Cour de cassation dans un arrêt du 13 octobre 2015[2].
En l’espèce, le 15 février 2007, un contrat de prêt avait été conclu entre une banque et une société, lequel prévoyait une clause de conciliation préalable. Le 23 février 2007, une personne physique s’était portée caution solidaire de la société. Assignée en paiement par la banque, la caution opposait l’irrecevabilité de la demande, excipant de la violation de la clause de conciliation préalable.
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence[3] avait accueilli cette fin de non-recevoir jugeant que l’obligation de mettre en œuvre une procédure préalable de conciliation s’analyse en une exception inhérente à la dette, cette prévision étant indifférente à la personne du souscripteur. Elle avait souligné que cette exception ne se rapporte qu’à l’obligation souscrite, dont elle définit les modalités présidant à son admission et à sa mise à exécution.
Cette solution est censurée par la Cour de cassation aux motifs que :
« La fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en œuvre d’une clause contractuelle qui institue une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, ne concerne, lorsqu’une telle clause figure dans un contrat de prêt, que les modalités d’exercice de l’action du créancier contre le débiteur principal et non la dette de remboursement elle-même dont la caution est également tenue, de sorte qu’elle ne constitue pas une exception inhérente à la dette que la caution peut opposer ».
Si la caution ne peut se prévaloir de la clause de conciliation préalable prévue au contrat de prêt (l’exception tirée de son non-respect étant purement personnelle au débiteur principal), il va sans dire que la solution aurait été différente si la clause avait figuré dans l’acte de cautionnement.
Contact : antoine.adeline@squirepb.com
[1] Cass., ch. Mixte, 14 février 2003, n°00-19.423 [2] Cass., Com., 13 octobre 2015, n°14-19.734 [3] CA Aix-en-Provence, 23 janvier 2014, n°11/09051