Dans la famille Littell, donnez-moi le père. Jonathan, l’incomparable auteur des « Bienveillantes » , a en effet de qui tenir. Robert Littell, ancien journaliste à Newsweek, spécialisé dans les affaires russes et moyen-orientales se consacre entièrement à la littérature depuis les années 70. Ses livres, régulièrement édités en poche sont traduits dans plus de vingt pays et figurent souvent sur les listes des best-sellers dans le monde entier.

« L’hirondelle avant l’orage », sous-titré « Le poète et le dictateur », a été traduit en français en 2009 et avait paru la même année à New-York sous le titre de « The Stalin epigramm » [1].

C’est en effet un poème violemment critique de Ossip Mandelstam qui lui fera affronter Staline dans un duel inégal d’une cruauté perverse. Que peuvent les mots d’un poète idéaliste révolté face à la mécanique implacable d’un système qui cherche à enrégimenter l’individu pour le bonheur de la classe ouvrière.

Le roman donne la parole alternativement – et chronologiquement de janvier 1934 à janvier 1939 – aux différents protagonistes. Il y a Mandelstam, son épouse Nadedja, leur amie intime la jeune Zinaïda et deux autres proches : la poétesse Akhmatova et le poète et romancier Boris Pasternak. Il y a encore, en contrepoint, Shotman, un champion d’haltérophilie et Vlassik, le garde du corps personnel de Staline, le dictateur dont l’ombre menaçante plane sur tous.

Ces destins croisés révèlent des caractères et des attitudes diverses et variées, changeantes aussi, dans une tourmente historique d’une violence extrême bien que feutrée et souterraine. Arrestations, tortures, exils, procès truqués, assassinats, la terreur rouge ne se distingue guère de celle du nazisme.

Très documenté, l’ouvrage se lit comme un thriller, si ce n’est que le frisson ressenti ne relève pas d’événements imaginaires.

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[1] Nombreux titres en Folio, J’ai lu, Points et 10/18