Ce que prévoit la loi n°2009 – 669 du 12 juin 2009, dite loi “Hadopi”

Cette loi dispose que les opérateurs sont tenus de communiquer, à la demande de l’Hadopi (Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur l’Interne), dans un délai de huit jours, les données techniques nécessaires à l’identification des abonnés dont les accès aux services de communication en ligne ont été utilisés à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d’œuvres ou d’objets protégés sans l’autorisation des titulaires des droits. [1]

En contrepartie, il est prévu que les opérateurs ont droit à une compensation au titre des surcoûts identifiables et spécifiques liées à ces services Toutefois, le décret devant déterminer les modalités de compensation n’a pas été publié à ce jour.

La décision du Conseil d’État du 23 décembre 2015

Par une décision du 23 décembre 2015, n°383110, le Conseil d’État a jugé l’État fautif du fait du dépassement d’un « délai raisonnable » dans l’élaboration du décret devant déterminer les modalités de compensation. Le Conseil d’État lui a enjoint de fixer ces modalités de compensation dans un délai de 6 mois, sous astreinte de 100 € par jour de retard.

La décision du Conseil d’État du 4 avril 2016

Conseil d’État, 4 Avril 2016, n°383110

Bouygues Telecom a saisi les juridictions administratives en demandant compensation du préjudice résultant du défaut d’édiction du décret précisant les modalités de compensation à compter du mois de septembre 2010, date à laquelle Bouygues Telecom a commencé à satisfaire les demandes de communication de données adressées par l’Hadopi. L’Hadopi a en effet toujours refusé de procéder au paiement des factures qui lui ont été adressées par Bouygues Telecom au motif qu’aucun décret n’avait été pris pour permettre l’indemnisation des prestations effectuées. Bouygues Telecom a réclamé d’être indemnisé à hauteur de 1.263.846,40 €.

Par une décision du 4 avril 2016, le Conseil d’État a statué en faveur de Bouygues Telecom en condamnant l’État à indemniser l’opérateur pour les « plus de 2 400 000 demandes d’identification d’adresses IP [traitées] entre septembre 2010 et novembre 2015. À ce titre, les dommages et intérêts obtenus par Bouygues Telecom sont de 900 000 €, y compris tous intérêts et intérêts des intérêts échus au jour de la présente décision ».

Les suites de cette décision

Cette décision ne passera pas inaperçue. Les autres opérateurs pourront, sur ce fondement, réclamer à leur tour d’être indemnisés par l’Hadopi. L’opérateur Free a lancé une procédure similaire il y a plusieurs mois. Ces demandes risquent d’ébranler la légitimité même de l’Hadopi, son coût de fonctionnement devenant significativement élevé par rapport aux résultats produits, et ce dans un contexte où les critiques à l’encontre de cette institution se multiplient.
  Contact : anne.baudequin@squirepb.com  


[1] Article L34-1 du Code des Postes et des communications électroniques et article L331-12 du Code de la Propriété Intellectuelle.