« Espoir » ; Etymologie : du provençal « esper », du latin « speres », qui se trouve dans Ennius. « Espoir » dans l’ancienne langue avait un emploi élégant. Il signifiait « peut être », qui l’a remplacé (Littré).

« L’espoir », en 1937, c’est un roman célèbre de Malraux et un film un an plus tard (« L’espoir Sierra de Terruel »). L’histoire finit mal me direz vous ; la légion Condor, les orages d’acier sur Guernica, la défaite républicaine et 4 années de guerre mondiale. Mais la roue de l’Histoire (avec sa grande H comme disait Perec) réserve des surprises ; après la guerre froide, après Franco, la démocratie espagnole renaît en 1975 grâce au roi Juan Carlos 1er, Juan Carlos Alfonso Víctor Maria de Borbón y Borbón, pour être précis.

BARAKA OBAMA

« Le monde change de peau, sera-t-il laid ou bien beau… » chantonnait Alain Souchon en 1976. Une génération plus tard, au milieu des tempêtes, l’espoir (faut-il dire mondial, global ?) a le visage du président Barack Obama. Son profil de médaille fait la une de tous les magazines de Nairobi à Honolulu en passant par la Lorraine, Londres et Chicago. Les (auto) hagiographies (« The audacity of hope ») se multiplient. «Il n’y a pas de héros sans auditoire» (Malraux, L’Espoir).
Mi-empereur romain, mi-pop star, c’est un gendre idéal, modèle Harry Belafonte ou Sidney Poitier (« Guess who’s coming to dinner ») ; charmeur, charismatique avec une tête bien faite. Une success story comme on les aime outre-atlantique (« Nothing succeeds like success »). On frôle l’idolâtrie, Obama nouveau messie, figure christique, icône vivante… Ne faisons pas la fine Bush, la politique c’est au fond une affaire de totem. A minima la mission est déjà accomplie (c’est la flamme de l’espoir). Dans la tourmente, Roosevelt disait que la seule chose à craindre c’est la peur (« the fear of fear »).

La reconstruction d’un nouvel ordre économique écologique et géopolitique mondial après le Pearl Harbour financier de l’automne, c’est une autre affaire. Au moins, Magic O aura eu l’intelligence et la prudence (contrairement à d’autres) de ne pas faire de promesses mirobolantes. Courage, les économistes sont plutôt optimistes et prévoient qu’un grand plan de relance keynésien pourra s’appuyer sur une reprise de la consommation mondiale des badges, tee-shirt, médailles porte bonheur, et casquettes floqués du logo « Yes we can ». Une affaire de Totem la politique, mais aussi de méthode Coué. «Etre aimé sans séduire est un des beaux destins de l’homme» (Malraux, L’Espoir).

QUELQUES COLOMBES POUR FAIRE LE PRINTEMPS

La suppression annoncée de la prison de Guantanamo, vilaine verrue et précédent fâcheux pour la démocratie américaine -volontiers donneuse de leçons de morale et de maintien juridique- est maintenant acquise. Bien sûr, on pourra finasser sur la légitime défense, l’état de nécessité et les nécessités de l’Etat, mais même la guerre a son droit. Pas facile de faire mentir La Fontaine (« La raison du plus fort est toujours la meilleure ») ou Carl Schmitt qui, finalement, ne dit pas autre chose i.e. l’essence, le point de butée de l’Etat souverain, c’est le principe de volonté, c’est ce qui fixe l’état d’exception. Ca tombe bien….

Je profite de cette tribune pour faire une annonce : on cherche des terres d’accueil pour recueillir les ex prisonniers de Guantanamo, victimes de l’arbitraire des méchants yankees. Pour l’instant ce n’est pas le franc enthousiasme dans les chancelleries de la vieille Europe aux anciens parapets démocratiques et humanitaires! « Nous pensons que cette question doit faire l’objet de consultations entre Européens (…) il est naturel qu’il y ait une réponse discutée et concertée entre Européens » a déclaré le porte-parole du quai d’Orsay. Cherchez l’erreur… Allons messieurs les plénipotentiaires un peu de cohérence… ! «Il y a des guerres justes. Il n’y a pas d’armée juste» (Malraux, L’Espoir).

Le 26 janvier 2009, la Cour pénale internationale (CPI) créée par le Traité de Rome signé le 17 juillet 1998 et qui siège à La Haye, a ouvert son premier procès (Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo). Le chef de l’Union des patriotes congolais (UPC) est accusé d’enrôlement et de conscription d’enfants soldats pour les faire participer activement dans les hostilités en République démocratique du Congo.

La CPI, qui juge des individus et non des États, est la première cour pénale internationale permanente créée pour connaître des « crimes les plus graves ayant une portée internationale ». Sa compétence n’est pas rétroactive (les crimes doivent avoir été commis après l’entrée en vigueur de son statut le 1er juillet 2002).

Elle est plus large que celle des TPI ( ad hoc) et dont les compétences ratione loci (ex-Yougoslavie, Rwanda) et ratione temporis (crimes commis depuis le 1e janvier 1991 pour le TPIY et au cours de l’année 1994 pour le TPIR) sont limitées.

La CPI peut être saisie par (i) un État parti au statut ou qui accepte la juridiction de la CPI en l’espèce à condition que le crime en question ait été commis sur le territoire de cet État ou que l’accusé en soit ressortissant, (ii) le procureur de la Cour pénale internationale, (iii) le Conseil de sécurité des Nations Unies agissant dans le cadre du chapitre VII de la Charte.

La compétence matérielle de la CPI comprend les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, les crimes de génocide. La définition du crime d’agression a été reportée à une date ultérieure faute de consensus. Les États conservent à titre principal la responsabilité de poursuivre et juger les crimes les plus graves, et la CPI ne sera compétente qu’en cas de défaillance ou de mauvaise volonté (principe de complémentarité). Une Chambre préliminaire est chargée de filtrer les saisines fantaisistes.

La Cour peut prononcer une peine pouvant aller jusqu’à la perpétuité ainsi, le cas échéant, qu’une amende ou « la confiscation des profits, biens et avoirs tirés directement ou indirectement du crime”. Les peines d’emprisonnement sont accomplies dans un État désigné par la Cour sur une liste de pays candidats.

Certains États, peut être gênés aux entournures, ont refusé de signer ou ratifier le Statut de Rome (Les Etats Unis, la Chine, la Russie, Israël). « La mort n’est pas une chose si sérieuse; la douleur, oui.» (Malraux, L’Espoir).

DU COTE DE LA PLACE VENDOME

Les avocats aboient (plus qu’ils ne mordent), les gardes des sceaux passent, les problèmes demeurent. Le débat sur la suppression des juges d’instruction et ses sempiternelles variations sur l’indépendance du parquet et de la justice paraît, hélas, un peu fade et réchauffé. Le problème de l’indépendance de la justice c’est comme le dopage au tour de France, un marronnier qui fini par lasser. On s’habitue, c’est comme cela… ! La justice (depuis 1958, une « autorité » et non plus un « pouvoir ») n’a jamais été triomphante ni même sereine en France. Le pouvoir, qu’il soit royal, impérial ou républicain n’aime pas les robins fouineurs, les juges frondeurs ou les procureurs trop indépendants (la fronde, les parlements sous l’ancien régime, les Napoléon, Riom, etc).

On trouvera toujours un constitutionnaliste de servil/ce pour expliquer que la présidence du « Conseil Supérieur de la Magistrature » par le Président de la République (qui par ailleurs, comme les présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat, nomme certains membres du CSM) est une bonne chose pour l’équilibre des pouvoirs. On rappellera que le CSM a pour mission et compétence : l’assistance du Président de la République dans son rôle de garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire, la nomination et la discipline des magistrats (articles 64 et 65 de la Constitution). Vaste programme… La docilité (judiciaire ou académique) favorise la multiplication des médailles multicolores et les belles carrières. « I have always found that mercy bears richer fruits than strict justice” disait Lincoln, dont Mr President se réclame avec insistance. Si déjà on avait la Justice … ! « Les hommes ne meurent que pour ce qui n’existe pas » (Malraux, L’Espoir)

Sur le vieux débat du droit naturel et la plainte d’Antigone, une réflexion du janséniste Nicole, qui, dans son traité sur le procès injuste, place la barre très haut: « Car ils s’accoutument à ne connaître plus d’autre justice que la justice légale. Ils appellent innocents ceux que l’on ne peut condamner selon les loix, et vrai ce qu’elles n’improuvent pas. Enfin, ils raisonnent tellement en Juges et en Avocats, qu’ils oublient en quelque sorte de raisonner en hommes » (Nicole; Neuvième traité, premier écrit, XIII 1671).

Les mots de la fin pour Malraux : « Manuel entendait pour la première fois la voix de ce qui est plus grave que le sang des hommes, plus inquiétant que leur présence sur la terre, la possibilité infinie de leur destin ; et il sentait en lui cette présence mêlée au bruit des ruisseaux et au pas des prisonniers, permanente et profonde comme le battement de son cœur ». L’Espoir…