Cass. soc. 16 février 2011, n° 09-72.061Cass. soc. 16 février 2011, n° 10-10.465

Les mises à la retraite d’office sont-elles encore possibles ?

La lecture et l’analyse des récents arrêts rendus par la Chambre sociale de la Cour de cassation permettent d’en douter.

Dans un premier arrêt concernant le personnel de la SNCF, la Cour considère que les dispositions statutaires[1] autorisant les mises à la retraite d’office de certains salariés à 55 ans n’étaient pas en elles-mêmes discriminatoires, mais qu’il appartenait toutefois aux juges du fond de vérifier si la décision individuelle de l’employeur de mettre à la retraite le salarié répondait aux conditions prévues par l’article L.1133-1 du Code du travail[2], qui dispose que « les différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont justifiées par un objectif légitime, notamment un objectif de politique d’emploi ».

Les motifs invoqués au cas d’espèce par la SNCF ayant été jugés trop vagues et généraux, la Cour de cassation considère que la mise à la retraite était dès lors constitutive d’une discrimination fondée sur l’âge et qu’elle devait en conséquence être annulée.

Dans un second arrêt rendu à l’encontre d’EDF, de la même manière, la Cour de cassation reproche aux juges du fond de n’avoir pas vérifié que la différence de traitement fondée sur l’âge était objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime et que les moyens pour réaliser cet objectif étaient nécessaires et appropriés.

Bien qu’étant des entreprises dites « à statut », les solutions dégagées par la Cour de cassation pourraient à l’évidence, et sur le même fondement, s’appliquer à l’avenir à toutes les entreprises privées.

Dès lors, toute mise à la retraite d’office doit également pour les entreprises privées être justifiée par un motif légitime… pour le moins délicat à établir !
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[1] Décret du 9 janvier 1954

[2] Repris de la Directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 et notamment de son article 6 § 1