CE 11 décembre 2009, Ge Healthcare Clinical Systems, n° 301341, 8e et 3e s.-s

En jugeant que ne constitue pas un produit imposable l’indemnité versée par une société mère à sa filiale déficitaire au titre de la surcharge d’impôt sur les sociétés qu’elle subira à l’occasion de sa sortie du groupe fiscal (CE 11 décembre 2009, Ge Healthcare Clinical Systems, n° 301341, 8e et 3e s.-s.), le Conseil d’Etat a apporté une précision importante en ce qui concerne les implications fiscales des conventions conclues entre les sociétés membres d’un groupe d’intégration.

Sur le même sujet, on rappellera que dans un récent article ( Répartition de la charge d’impôt au sein des groupes intégrés), nous avions évoqué la décision de la Cour administrative d’appel de Lyon qui avait jugé que les sociétés membres d’un groupe fiscal intégré sont libres de définir les modalités selon lesquelles elles souhaitent répartir la charge d’impôt entre elles, remettant ainsi en cause la position de l’Administration fiscale selon laquelle l’écart entre le montant des contributions réclamées aux filiales, calculé au cas d’espèce en fonction de leurs résultats, et le montant de l’impôt sur les sociétés dont elles auraient été redevables si elles étaient restées imposables séparément – conformément au principe de « neutralité » de l’intégration fiscale – devait s’analyser comme une subvention imposable.

C’est une question un peu différente que le Conseil d’Etat a eu à juger dans l’arrêt Ge Healthcare Clinical Systems.

En application des dispositions relatives au régime de groupe, les déficits subis par les filiales membres d’un groupe fiscal sont pris en compte pour la détermination du résultat d’ensemble au cours de la période pendant laquelle les filiales sont dans le périmètre d’intégration, et ils sont corrélativement définitivement perdus pour lesdites filiales qui ne les récupèrent pas en cas de sortie du groupe.

En vue notamment de préserver les intérêts des éventuels actionnaires minoritaires de ces filiales, il est fréquent que dans le cadre des conventions d’intégration fiscale – ou dans celui des conventions de sortie d’intégration – il soit prévu un dédommagement des filiales sortantes au titre du préjudice résultant de la perte du droit au report de leur déficits subis pendant leur période d’appartenance au groupe fiscal.

Selon l’administration fiscale, une telle indemnité constitue un produit imposable pour la filiale qui la perçoit dès lors que la perte du report des déficits est une conséquence de l’application de la loi fiscale et qu’elle n’entraine donc pas pour celle-ci un préjudice susceptible de créer une obligation d’indemnisation, laquelle n’est au demeurant pas prévue par la loi.

Cette analyse, qui avait reçu un accueil favorable de la juridiction d’appel, est réfutée par le Conseil d’Etat.

Selon la Haute Juridiction, même si le principe d’indemnisation n’est pas prévu par la loi, rien ne s’oppose à ce que les parties prévoient contractuellement que la société tête du groupe d’intégration dédommagera les filiales sortantes au titre de la perte du droit au report de leurs déficits.

Conformément à sa jurisprudence, le Conseil d’Etat juge en outre qu’une telle indemnisation n’est pas imposable dans la mesure où elle compense une charge elle-même non déductible, à savoir une surcharge d’impôt sur les sociétés consécutive à la perte du report déficitaire.