Cass. Civ. 1ère 19 juin 2013, n° 12-17.591

Dans un précédent article (« Google Suggest : nouvelle condamnation »), nous avions évoqué la condamnation de Google par la Cour d’appel de Paris sur le fondement des articles les articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881, réprimant la diffamation et l’injure.

Deux ans plus tard, la Cour de cassation s’est prononcée et a tranché en faveur d’une absence de responsabilité du moteur de recherche pour les suggestions injurieuses proposées par la fonctionnalité Google Suggest.
 

Les prétentions de la Société Lyonnaise de garantie

La Société Lyonnaise de garantie a assigné Google Inc., le directeur de la publication du site internet www.google.fr ainsi que Google France pour injure publique, à la suite de l’apparition lors de la saisie des termes « Lyonnaise de g » sur les moteurs de recherche accessibles aux adresses google.fr, google.be, google.uk, google.es, google.it et google.ca, des mots ou propositions de requêtes « Lyonnaise de garantie escroc » au troisième rang des suggestions proposées.

Cette société estimait alors que l’association de ces mots constituait une injure publique, indépendamment du contenu des articles ou documents auxquels les requêtes renvoyaient. Les juges du fond avaient accueilli la demande de la société d’assurance et ordonné sous astreinte Google, et son directeur de publication, de prendre toute mesure pour supprimer l’expression litigieuse.
 

Une injure publique pour les juges en appel

La Cour d’appel de Paris a confirmé ce jugement en énonçant que le fait de diffuser auprès de l’internaute l’expression « lyonnaise de garantie, escroc » correspondait à l’énonciation d’une pensée rendue possible uniquement par la mise en œuvre de Google Suggest, dont les propositions procédaient d’une base de donnée constituée par Google et mise en œuvre par un algorithme créé par Google.

Une violation du droit pour la Cour de cassation

La Cour de cassation, elle, a estimé que la cour d’appel de Paris avait fait fausse route dans son interprétation des articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 (relatifs à la diffamation et à l’injure). En effet, les sages ont fait valoir que la suite de mots clés proposée par Google Suggest est le fruit d’un processus purement automatique et aléatoire. L’affichage de l’expression litigieuse était donc exclusif de toute volonté de l’exploitant du moteur de recherche d’émettre les propos en cause ou de leur conférer une importance significative au-delà de la simple juxtaposition. Il n’est donc pas possible d’établir la responsabilité de Google puisque l’apparition du terme « escroc » après « Lyonnaise de garantie » n’est pas maitrisée par Google.
 

Stéphanie Faber est Membre de voxFemina – Paroles d’Experts au Féminin