En mars 2007, le Conseil de la concurrence avait sanctionné la société GlaxoSmithKline (GSK) à hauteur de 10 millions d’euros pour s’être rendue coupable de prix prédateurs ayant évincé les fabricants de génériques du marché de la vente de certains médicaments aux hôpitaux.
A la faveur de cette décision, le Conseil avait adopté la première condamnation pour prix prédateurs sur le fondement de la prohibition des abus de position dominante.
La décision a cependant été réformée par la Cour d’Appel de Paris dans un arrêt du 8 avril 2008, arrêt que la Cour de cassation vient de confirmer. (Les trois décisions sont disponibles sur le site de l’Autorité de la concurrence via le lien suivant: http://www.autoritedelaconcurrence.fr/user/avisdec.php?numero=07-D-09 )
Le Conseil de la concurrence avait été initialement saisi de pratiques mises en œuvre par GSK sur le marché des céphalosporines de deuxième génération sur lequel GSK n’était pas en position dominante et le marché de l’aciclovir injectable sur lequel il était en position dominante. Il était reproché à GSK d’avoir, au moment où commençaient à se développer des offres de médicaments génériques, conduit une politique de prix prédateurs sur le marché des céphalosporines dans le but de se constituer une réputation d’agressivité et d’envoyer de la sorte un signal au génériqueurs afin de les dissuader d’entrer sur le marché des spécialités hospitalières, dont celui de l’aciclovir injectable.
L’argumentation du Conseil se basait notamment sur le test de coût introduit par la jurisprudence Akzo, selon lequel la prédation est présumée lorsque le prix de vente pratiqué est inférieur aux coûts variables, ce qui était le cas sur la période incriminée. Le test de coût s’étant révélé probant et en l’absence d’éléments susceptibles de renverser la présomption d’intention prédatrice, qui en l’état du droit positif était suffisante pour entrer en condamnation, le Conseil aurait sans doute pu ne pas aller plus loin dans la démonstration de l’abus. Il a cependant souhaité l’étayer par l’établissement de l’existence d’une stratégie prédatrice par construction d’une réputation. En effet, selon le Conseil, la portée de l’arrêt Akzo ne se réduit pas à un test de coût mais s’étend à l’analyse globale du fonctionnement du marché et à la stratégie de prédation.
C’est précisément sur ce dernier point que la Cour d’Appel et la Cour de cassation ont concentré leurs critiques. Par cette démonstration le Conseil n’aurait pas réussi à établir l’existence de circonstances particulières de nature à établir le lien nécessaire entre les pratiques de prix sur marché non dominé et la position dominante de GSK sur un autre marché.
Il est notamment relevé que les marchés en cause ne présentent pas les liens de connexités requis par la jurisprudence. De plus, les laboratoires susceptibles d’entrer sur le marché dominé n’étaient semble-t-il pas présents sur le marché affecté par les pratiques. Il n’était pas non plus démontré que les concurrents disposaient des éléments nécessaires afin d’interpréter la politique tarifaire de GSK comme un signal d’agressivité de sa part, destiné à les dissuader d’entrer sur le marché. Enfin, il est retenu que les représentants des laboratoires concurrents ne font pas référence au comportement de GSK dans leur exposé des raisons les ayant conduit à ne pas entrer sur le marché dominé.
En rejetant le pourvoi introduit par le ministre de l’Economie, la Cour de cassation approuve l’ensemble du raisonnement adopté dans l’arrêt de la Cour d’appel, devenu définitif.