Le Conseil de la concurrence sanctionne quatre compagnies pétrolières pour une entente lors d’un appel d’offre organisé par Air France en 2002, concernant son approvisionnement en carburant sur l’escale de Saint-Denis de la Réunion. Dans cette affaire, l’enquête a pu être menée à son terme, notamment grâce à la coopération de l’autorité de concurrence britannique, une première au sein du réseau européen de concurrence !

Les compagnies pétrolières Chevron-Texaco, Total, Exxon et Shell, en situation d’oligopole sur le marché de la Réunion, s’étaient concertées afin de se répartir le marché couvert par l’appel d’offre en présentant à Air France des offres de volume dont la somme correspondait exactement aux besoins d’Air France sur cette escale. Les compagnies avaient donc décidé de ne pas se faire concurrence sur les prix, renonçant de fait à remporter individuellement l’appel d’offre pour des quantités plus élevées. Afin de couvrir ses besoins en carburant, Air France n’avait alors d’autres choix que d’accepter chacune de ces offres, sans marge de manœuvre concernant les prix ou les quantités proposées. Cette pratique a eu pour effet une augmentation de 30% du coût d’approvisionnement en carburant par rapport à l’année précédente.

Cette affaire mérite une attention particulière en ce qu’elle constitue le premier cas de mise en œuvre des dispositions de l’article 22 § 1 du règlement 1/2003 qui permet à une autorité de concurrence de mener des enquêtes au nom et pour le compte de l’autorité d’un autre Etat membre lorsqu’une violation du droit communautaire est suspectée.

En effet, bien que la pratique soit d’apparence assez évidente, il s’est révélé particulièrement difficile de réunir les preuves matérielles de l’entente. Le Conseil a donc sollicité l’Office of Fair Trading britannique afin qu’il conduise des investigations aux sièges de trois des entreprises mises en cause. Cette collaboration entre les autorités françaises et britanniques a d’ailleurs été décisive : les documents les plus probants pour établir l’entente ayant été découverts dans le bureau londonien de l’une des compagnies pétrolières.

La mise en œuvre de cette procédure place donc le Conseil une nouvelle fois en précurseur, comme il l’a été lorsqu’il a adopté un programme de clémence sur le modèle communautaire. Cette décision confirme l’importance et la vitalité du fonctionnement du réseau européen de concurrence et des échanges entre autorités qui ont lieu en son sein.