Les interprétations extensives de Bercy en matière de droit d’enregistrement ont décidément la vie difficile depuis quelques temps. Outre la remise en cause par la Cour de cassation de l’assimilation de la réduction de capital non motivée par des pertes à un partage partiel et donc de l’application du droit de 1,1% (voir notre article), la position de l’administration fiscale sur l’extension du champ d’application territorial du droit de mutation de l’article 726 du CGI aux cessions de sociétés étrangères à prépondérance immobilière française fait l’objet d’un sérieux débat avec plusieurs tribunaux de grande instance du sud de la France.

Les cessions de titres de sociétés françaises sont soumises à la formalité de l’enregistrement et donne lieu à la perception d’un droit de mutation et ce, qu’elles soient ou non constatées par un acte.

En application des dispositions de l’article 726 du Code Général des Impôts, les cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière sont soumises au droit de mutation à titre onéreux au taux de 5%, quelle que soit leur forme.

S’agissant des titres de sociétés étrangères, il résulte des dispositions de l’article 718 du même Code, que leur cession n’est en principe passible du droit de mutation que si elles sont constatées par un acte passé en France.

Selon l’administration fiscale (D. Adm. 7 D-5; n° 12, mise à jour du 15 juin 2000), il résulte des dispositions de l’article 726 du CGI que les cessions de titres de sociétés étrangères dont l’actif est principalement constitué par des biens immobiliers situés en France sont passibles du droit de vente de 5%, même lorsque l’acte est passé à l’étranger.

Or, cette position a été remise en cause par des décisions successives des tribunaux de grande instance de Nice et plus récemment de Grasse (TGI Nice 27 septembre 2007, n° 05-1327, 3e ch. civ., Turretini ; TGI Grasse 4 septembre 2008, n°07-3711, 1ère ch. civ., Samuelson). Ces derniers relèvent, à juste titre, que l’article 726 du CGI ne fait que définir le taux du droit applicable à certaines mutations et notamment, celles des titres de sociétés à prépondérance immobilière, mais ne contient aucune règle de territorialité. Ainsi, il ne peut faire exception aux principes posés par l’article 718 du CGI, et il en résulte que la cession d’une participation dans une société étrangère, même à prépondérance immobilière française, ne peut donner lieu au droit de vente de 5% si l’acte est passé à l’étranger.

L’administration fiscale a cependant réaffirmé sa position dans une récente décision de rescrit (RES N° 2008/22 [ENR], décision du 14 octobre 2008) et a fait appel du jugement du TGI de Grasse, ce qu’elle avait manqué de faire à la première rebuffade.

Affaire à suivre.