Une réforme profonde

Rappelons que la Companies Act 2006, avec ses 1,300 articles et 16 annexes, est la loi la plus longue de l’histoire parlementaire outre-manche. Elle a pour but tant la réaffirmation ou la modification de la majeure partie de la Companies Act 1985, que la codification à droit constant de certains principes du droit coutumier ou encore la mise en oeuvre des Directives communautaires «Transparence » et « OPA ». Ce texte législatif contribue effectivement à la création d’un code du droit des sociétés en Angleterre.

Cette loi rentre progressivement en vigueur depuis bientôt deux ans et ne sera pleinement applicable qu’à compter du 1er octobre 2009. Le prochain « épisode » aura lieu le 1er octobre 2008, lorsque entreront en vigueur les parties les plus contestées relatives à la responsabilité des dirigeants. Les praticiens multiplient les articles pour décrier, notamment, l’obligation pesant sur les dirigeants de déclarer tout possible conflit d’intérêt pour tout contrat engageant la société.

Dans notre article d’octobre 2007, nous traitions notamment des réformes afférentes aux domaines suivants : la responsabilité des dirigeants, le rapport d’activité et le rapport des dirigeants, les décisions et réunions d’actionnaires, ainsi que les statuts type modifiés. Certaines autres dispositions sont depuis lors entrées en vigueur.

Simplification de la signature de documents

La loi introduit un changement important relatif au mode de signature des actes : les accords auxquels une société anglaise est partie peuvent désormais être signés au nom et pour le compte de la société par un seul administrateur, en présence d’un témoin (qui devra également signer l’accord en question).
Auparavant, deux administrateurs devaient signer les actes. La réforme allège donc la procédure. C’est particulièrement appréciable dans le cas où, par exemple, les filiales anglaises de sociétés françaises auraient peu d’administrateurs présents ou disponibles.

La mise en place de documents contractuels est dorénavant plus aisée, y compris pour les deeds (documents comparables aux actes notariés), qui sont également concernés.

Rappelons que les stipulations pour autrui posent problème en droit anglais, car un contrat ne peut être que le fruit de concessions mutuelles (consideration de part et autre). Une des meilleures parades à cette restriction était jusqu’à présent d’accorder un certain degré de formalisme au document en le faisant signer sous forme de deed. Un deed peut être utilisé par les filiales anglaises de sociétés françaises mettant en place des contrats « à sens unique », par exemple une garantie à première demande souscrite par la société mère (française) en faveur d’un tiers pour les dettes éventuelles de sa société fille (anglaise) sans contrepartie provenant de cette dernière. Dorénavant, le deed peut être signé par un seul et unique administrateur – sans oublier le témoin.

Le témoin : pensez à votre avocat

La signature de l’administrateur, désormais unique, s’effectuera devant témoin, lequel devra également signer le document. Il n’y a aucune contrainte relative à l’identité ou la qualité de la personne agissant comme témoin (si ce n’est qu’il doit s’agir d’une personne physique), donc un avocat ou un employé lambda de la société peut signer en qualité de témoin.

Rapports de gérance et comptabilité : obligations accrues

Le 6 avril dernier, un certain nombre de dispositions supplémentaires relatives à la gestion financière des sociétés (tout le Chapitre 15 de la Companies Act) sont entrées en vigueur. Ces dispositions imposent ainsi aux administrateurs/gérants de sociétés anglaises une obligation générale de n’approuver les comptes que si ceux-ci reflètent de façon exacte et juste la situation financière de la société, incluant, dans le cas de comptes consolidés, la situation financière de filiales du groupe. Dans le cas des limited comme des public companies (équivalentes, peu ou proue, aux S.A.R.L. et aux S.A., respectivement), le délai accordé pour déposer les comptes suivant la fin de l’exercice fiscal est désormais réduit d’un mois, pour prendre en compte l’utilisation croissante des nouvelles technologies dans l’accomplissement de cette formalité.

Davantage de comptes consolidés – un souci de transparence financière

L’exemption relative à l’obligation de préparer des comptes consolidés pour les entreprises à la tête de groupes de taille moyenne est supprimée et ne s’appliquera désormais qu’aux « petites » sociétés.
Responsabilité accrue des commissaires aux comptes.

Enfin, constitue désormais une infraction la certification par les commissaires aux comptes de la société des comptes qui omettraient de façon volontaire ou par négligence des informations cruciales relatives aux comptes de la société ou qui comporteraient des informations erronées ou trompeuses.

Fin des company secretaries ?

Il est désormais possible pour les limited companies (comparables aux S.A.R.L.) de décider ne pas nommer de secretary (équivalente à la fonction de secrétaire général en France).

Il a également été précisé qu’une société ne saurait avoir pour administrateurs uniquement des personnes morales ; ses dirigeants devront au minimum comporter une personne physique.

Capital social en euros

Enfin, depuis le mois d’avril, les Plc anglaises (semblables aux S.A.) peuvent choisir de détenir leur capital social en livres sterling ou en euros. Ainsi, le minimum légal sera de 50,000 livres sterling ou 65,600 euros.