Le mois de mai 2009, riche en colloques et interventions, s’est clôturé par une réunion de praticiens du droit et de professionnels (opérateurs, médias… ).

Réunis autour de Monsieur Jean-François Vilotte, futur président de l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ci-après « ARJEL ») et de deux autres futurs membres, Messieurs Kelly et Darracq, le directeur des casinos Partouche, du PMU, de Zeturf, de Concours Mania et de Betclik ont débattu sur le futur projet de loi et l’ouverture du marché.

Ce colloque a donné lieu à de très nombreux échanges, parfois vifs mais toujours passionnants, entre la salle et les intervenants.

1/ La lutte contre les sites illégaux

La protection du joueur et des opérateurs est au cœur du projet de loi. De ce fait, elle devra être traitée avec la plus grande attention et des moyens importants devront être mis en place notamment pour assurer le respect des droits accordés en contrepartie de l’acquisition des licences.

Les opérateurs ont d’emblée mis en avant l’incapacité de l’Etat à empêcher le développements des sites illégaux avec les moyens techniques actuels, notamment la tentation de passer des plate-formes en « .fr » aux plate-formes en « .com » des principaux opérateurs.

Si Monsieur Vilotte a défendu le projet de loi, indiqué que les opérateurs candidats à des licences seraient protégés et que tout serait mis en place pour lutter contre les sites illégaux, il n’est toutefois pas rentré dans le détail des moyens techniques envisagés.

Le futur Président de l’ARJEL a précisé qu’une réunion devait être organisée avec les fournisseurs d’accès à internet (FAI) afin de travailler « main dans la main » sur des solutions pratiques et de permettre un jeu contrôlé, sécurisé et responsable.

Les solutions techniques, si elles existent, restent à déterminer, ce qui devrait permettre le développement d’un marché porteur dans les mois et années à venir dans ce secteur.

Au-delà de ces considérations, un confère a fait débat en indiquant qu’aujourd’hui beaucoup parlent de « sites illégaux », mais qu’en réalité la plupart de ces sites disposent d’une licence européenne qui, eu égard au principe de « reconnaissance mutuelle » entre Etats membres en Europe, leur enlève toute notion d’illégalité au sens du droit communautaire.

Les récentes remarques de la Commission sur le projet de loi français vont dans ce sens, et certains « recalés » seront sûrement désireux de faire reconnaître leurs droits acquis dans un autre Etat auprès des juridictions européennes.
2/ La fiscalité

Les opérateurs ont unanimement souligné que la taxation actuelle « sur les mises » n’était pas adaptée à leur activité et rendrait les paris, notamment à la côte, peu attractifs.

Les dirigeants de Betclik et de Partouche ont appelé à une fiscalité plus adaptée aux contraintes du marché, et permettant au final de pérenniser leurs structures.

Il a aussi été indiqué que le joueur était le grand oublié de ce projet de loi et que s’il lui était présenté deux choix, un site français très contrôlé, très régulé avec une fiscalité lourde et un autre site présentant des chances de gains de 20 à 30 % supérieures, son choix serait simple (…).

Cette affirmation a été tempérée par certains opérateurs, indiquant que le joueur [français] préférerait être « certain » de toucher ses éventuels gains plutôt que de jouer via un site étranger sans aucune assurance de retours.

Monsieur Vilotte a maintenu les pourcentages de prélèvement présentés dans le projet de loi concernant la fiscalité, ceci permettant notamment un juste retour aux filières.

3/ La publicité

Monsieur Vilotte a mis en garde très fermement les opérateurs qui depuis de nombreuses semaines agissent comme si le marché était d’ores et « déjà ouvert », notamment par le biais de publicités ou d’ouvertures de sites de paris en ligne.

Il a précisé que des sanctions juridiques ou politiques étaient à craindre et seraient en tout état de cause exemplaires.

Ainsi, les opérateurs doivent rester prudents et attendre l’ouverture du marché avant de lancer leur offensive à l’égard des joueurs français. Monsieur Vilotte a mis en avant l’existence de cyber-patrouilleurs chargés de détecter les fraudeurs et dont l’action serait au centre du dispositif du projet.

Il a aussi été indiqué que le PMU et la Française des jeux, par le biais de leurs campagnes de publicité dans la presse, étaient susceptible de préempter un marché en phase d’ouverture et que cette attitude était condamnable au plan européen. Ce propos a été tempéré par plusieurs intervenants bien conscients du poids de ces acteurs et des enjeux sociaux notamment dans le secteur équin.

Un participant a enfin interrogé Monsieur Vilotte en lui demandant s’il était envisageable de communiquer « sur le fait de demander prochainement une licence », l’intéressé a répondu que la loi s’appliquait à tous et que l’interdiction de toute publicité était actuellement en vigueur et ne pouvait être contournée… même par ce bais.

4/ Le modèle italien

Le modèle italien d’ouverture du marché a été souvent cité en exemple, notamment par Monsieur le Ministre Eric Woerth.

La récente remise en cause de ce système, notamment concernant ses aspects fiscaux, a été mise en exergue par plusieurs opérateurs.

En effet, l’Etat italien s’est aperçu que les opérateurs ne gagnaient pas d’argent avec les taux élevés de prélèvements, ce qui réduisait l’intérêt de l’acquisition d’une licence. Il vient donc de modifier son système (mi juin).

Les autorités italiennes ont ainsi accepté de placer ces taxes non-plus sur les mises mais sur le produit brut des jeux, avec un taux de 20%.

A bon entendeur…