Le 29 mars, se tenait à la Maison du barreau un atelier de pratique arbitrale sur le thème « la transparence dans l’arbitrage » organisé par le Comité français de l’arbitrage. Ce sixième atelier était animé par Messieurs Nougein et Pellerin. Le thème était particulièrement bien choisi en cette période de débat bruyants sur le devenir de l’arbitrage, quelque peu chahuté en raison de la multiplication des cas de conflits d’intérêts, dont les tribunaux français et étrangers sont amenés à connaître.

Nous avons réfléchi sur le cas, par exemple, d’un arbitre indépendant et impartial qui a des raisons de penser que son co-arbitre ne l’est pas. Que faire ? Le secret du délibéré l’empêche de « dénoncer » son collègue. Nous avons enchaîné en nous demandant à quel moment commence le délibéré, alors que sa fin coïncide évidemment avec le prononcé de la sentence. Il a été surtout question du devoir de révélation, qu’il soit négatif («je n’ai rien à révéler, je suis indépendant») ou positif («J’ai siégé à plusieurs reprises avec mon co-arbitre ou le Président du Tribunal ; j’ai été nommé à trois reprises par les avocats du demandeur…»)

Les participants ont ensuite réfléchi sur les liens entre l’indépendance, l’impartialité, la compétence et la disponibilité. Alors que l’arbitrage international est devenu un système processuel sophistiqué, il n’est pas inutile pour pérenniser l’institution de fixer les limites du devoir de révélation. Que faut-il révéler, quand, comment, à qui et dans quels détails ? Y-a-t-il des faits prescrits ? Quelle-est la durée raisonnable de la prescription ? L’arbitre a-t-il une obligation de résultat en matière de révélation ? Quels sont les liens entre la confidentialité, qui est de droit en matière interne (article 1464, al-3 du CPC) et le devoir de révélation ?

L’article 1464 du CPC stipule :

« A moins que les parties n’en soient convenues autrement, le tribunal arbitral détermine la procédure arbitrale sans être tenu de suivre les règles établies pour les tribunaux étatiques.
(…)
« Les parties et les arbitres agissent avec célérité et loyauté dans la conduite de la procédure.

« Sous réserve des obligations légales et à moins que les parties n’en disposent autrement, la procédure arbitrale est soumise au principe de confidentialité. »

Une opinion dissidente constitue-t-elle une violation du secret du délibéré ? Pas nécessairement.

A toutes ces questions, les réponses n’ont pas été évidentes.

Il a semblé à l’atelier que le meilleur guide restait l’éthique personnelle des arbitres et qu’il convenait de manier avec précaution les codes de déontologie et autres IBA rules on conflicts of interest.

D’ici quelques années, la jurisprudence française, par la multiplication des arrêts sur les conflits d’intérêts, devrait être affermie. Les arbitres, les parties, mais aussi leurs conseils, ajoutons les experts et les témoins, sauront quelles sont les barbelés à ne pas franchir. L’institution arbitrale y gagnera en fiabilité, mais aussi les usagers de l’arbitrage, qu’ils soient internes ou internationaux.

C’est l’occasion de saluer le travail remarquable du Comité Français de l’Arbitrage, qui non seulement publie la Revue de l’arbitrage, que de nombreux praticiens étrangers nous envient, mais organise colloques et ateliers de pratique arbitrale.