Cass civ. 1, 19 septembre 2018 n°17-24.347
Quel bonheur lorsqu’une règle du Code civil semble juste faite pour résoudre votre problème. Mais attention, il y a des pièges ! Elles ont beau figurer dans le code actuel, certaines règles ne s’appliquent pas à votre situation (contrairement à d’autres dispositions qui, elles, n’y sont plus). D’aucuns en ont déjà fait l’amère expérience.
Les faits
Une société ayant vendu en 2013 un climatiseur pour lequel elle devait aussi assurer la maintenance, a été confrontée au bout de deux ans, en 2015, en raison d’une modification intervenue entre-temps sur l’immeuble où avait été installé le climatiseur, à l’impossibilité d’exécuter ses services. Le client, privé des services de maintenance, a attaqué en dommages et intérêts. La société a trouvé dans l’article 1186 du Code civil, qui prévoit la caducité du contrat « si l’un de ses éléments essentiels disparaît », le fondement pour justifier la fin du contrat. La juridiction de proximité de Marseille l’a suivie sur ce fondement.
L’arrêt
La Cour de cassation casse le jugement aux motifs que l’article 1186 sur lequel se fonde la juridiction de proximité n’est entré en vigueur que le 1er octobre 2016, et ne pouvait donc pas s’appliquer à un contrat conclu antérieurement.
Les règles
L’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 réformant le code civil prévoit en son article 9 (sous réserve d’exceptions très spécifiques) que les nouveaux articles du code ne s’appliquent qu’aux contrats conclus après sa date d’entrée en vigueur. La loi de ratification n° 2018-287 du 20 avril 2018 est venue apporter une précision importante, le texte définitif indiquant « Les contrats conclus avant [le 1er Octobre 2016] demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d’ordre public ».
Les enjeux
Les tribunaux doivent donc continuer à appliquer le droit antérieur aux contrats conclus avant le 1er Octobre 2016. On a pu imaginer que la jurisprudence allait évoluer pour se rapprocher des nouvelles dispositions. Mais visiblement, si cela peut encore s’envisager pour des adaptations mineures, elle n’évolue pas au point d’appliquer aux contrats antérieurs des dispositions nouvelles.
Les entreprises sont donc amenées à s’interroger sur les dispositions qui régissent leurs contrats. Cela peut être plus particulièrement le cas lorsqu’un contrat est conclu avec effet rétroactif ou effet différé, ou encore lorsqu’il s’agit de choisir entre « renouvellement » ou « prorogation » d’un contrat antérieur.
Par ailleurs, la loi de ratification du 20 avril 2018 a procédé à certaines modifications de l’ordonnance qui ont pris effet le 1er octobre 2018. Ceci signifie qu’il y a un régime différent pour les contrats conclus entre le 1er octobre 2016 et le 1er octobre 2018 et ceux conclus après le 1er octobre 2018. Et justement, nous venons de passer cette échéance du 1er octobre.
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