Question prioritaire de constitutionnalité

Nous vous avons présenté dans La Revue tout l’intérêt de la nouvelle procédure de Question Prioritaire de constitutionnalité (QPC) de saisine du Conseil Constitutionnel [1]. Ses effets ne se sont pas faits attendre.

Plusieurs décisions essentielles ont d’ores et déjà été rendues, et ce en dépit de la réserve initiale de la Cour de cassation, notamment la décision du Conseil Constitutionnel en date du 30 juillet relative à la garde à vue.

Le Conseil Constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions sur la garde à vue de droit commun (articles 62, 63, 63-1 et 63-4 al. 1 à 6 du code de procédure pénale), tout en reportant leurs dates d’abrogation au 1er juillet 2011.

Le Conseil constitutionnel impose l’assistance effective d’un avocat lors de la garde à vue. Il fait ainsi prévaloir les principes constitutionnels des droits de la défense et de la présomption d’innocence, également rappelés par la Cour européenne des droits de l’homme encore dernièrement dans ses arrêts Salduz et Dayanan.

Ceci devrait enfin mettre un terme à la banalisation du recours à cette mesure utilisée sans considération de la gravité des infractions présumées.

En conséquence, un avant projet de loi tendant à limiter et encadrer les gardes à vue vient d’être présenté, puisqu’il est urgent que le Parlement légifère, les gardes à vue se déroulant actuellement en violation des droits de la personne gardée à vue.

Toutefois, cet avant projet de loi prévoit la création de l’audition libre qui constitue une aggravation de la situation de la personne et un contournement manifeste des droits de la défense. Il convient de rappeler que ce qui a été condamné par le Conseil Constitutionnel c’est l’impossibilité générale de bénéficier d’un avocat pendant la phase d’interrogatoire, ce qui donc exclu l’audition libre.

Une même décision vient d’être rendue le 22 septembre 2010 par le Conseil constitutionnel en matière de captures douanières. Le Conseil Constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles les gardes à vue en matière douanière pour les mêmes motifs : « Considérant que, selon les requérants, ces dispositions, qui privent la personne en retenue douanière de l’assistance d’un avocat, méconnaissent les droits de la défense ».

C’est ainsi que depuis l’entrée en vigueur de la loi le 1er mars 2010, le Conseil Constitutionnel a déjà rendu pas moins de 22 décisions dans 35 affaires posant une question prioritaire de constitutionnalité et l’on ne peut que se féliciter de cette avancée décisive pour l’État de droit et du succès de cette nouvelle procédure, s’agissant d’assurer la protection de nos droits fondamentaux et notamment les droits de la défense.

Acte d’avocat

Le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées instaurant l’acte d’avocat a été adopté le 30 juin 2010 par l’Assemblée Nationale.

L’objectif est de renforcer la sécurité juridique des contrats passés entre personnes privées, sans pour autant leur conférer le caractère d’actes authentiques.

L’acte sous seing privé contresigné par l’avocat permet ainsi de s’assurer que chacune des parties à l’acte a été pleinement éclairée de toutes les conséquences juridiques de celui-ci. Il tire sa sécurité juridique renforcée de la qualité de son auteur en termes de compétences, d’obligations déontologiques et de responsabilité professionnelle.

Cet acte fait pleine foi de l’écriture et de la signature des parties tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayants cause. La procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable. Par ailleurs, et sauf disposition contraire, il est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.

Procédure participative

La proposition de loi Béteille [2], également adoptée à l’Assemblée nationale le 30 juin, introduit en droit français la procédure participative de négociation assistée par un avocat [3].

Par cette convention, les parties à un différend, qui n’a pas encore donné lieu à la saisine d’un juge ou d’un arbitre, s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend, mais elle sera exclue en matière de droit du travail.

Absence de secret professionnel des juristes d’entreprise

Enfin, un arrêt de la CJCE « Akzo Nobel » vient d’être rendu le 14 septembre 2010 relatif à l’absence de secret professionnel des juristes d’entreprise.

La Cour confirme sa jurisprudence AM & S et ne reconnait pas comme confidentiels les échanges de correspondances avec le juriste interne à l’entreprise, à la seule exception de ses correspondances avec un Avocat externe à l’entreprise.

Compte tenu des nécessités de l’entreprise et du droit des affaires, cette jurisprudence est de nature à relancer les débats sur l’avocat en entreprise…

Une actualité donc particulièrement chargée. A suivre…

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[1] L’application de la question prioritaire de constitutionnalité par la Cour de cassation

[2] Proposition de loi relative à l’exécution des décisions de justice et aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées

[3] Voir aussi notre article : La procédure participative