Vous vous rendez compte que votre passeport en cours de validité expire dans moins de six mois. Vous ne pourrez donc pas entrer sur le territoire américain ou brésilien, le service de l’immigration exigeant un passeport d’une validité supérieure à six mois.

En catastrophe, vous vous procurez timbres fiscaux (88€), photo d’identité millimétrée, formulaire que vous remplissez minutieusement en n’oubliant pas le lieu de naissance de votre père (information que la Préfecture a sur son fichier, mais vous redemande à chaque renouvellement pour tester votre mémoire) et vous présentez votre dossier à une antenne de la Préfecture de Police dans votre arrondissement.

Même si le personnel de la Préfecture n’est pas débordé, vous ne pourrez pas déposer votre dossier, ni laisser vos empreintes digitales, car il vous faut impérativement prendre rendez-vous, ce que vous ne pouvez pas faire sur place ! Le rendez-vous se prend exclusivement par Internet ou par téléphone.

Oubliez le téléphone, le central est toujours débordé et donc bloqué. Faites-en l’expérience en composant le 01.58.80.80.80. Vous attendez avec un enregistrement qui vous propose la solution Internet et après 15 minutes, on vous demande de raccrocher : « La préfecture de police vous remercie de votre appel. Tous nos agents étant occupés, veuillez renouveler votre appel ultérieurement ». De guerre las, vous vous rabattez sur www.prefecturedepolice.fr

Renouveler son passeport : choc de simplification ou chemin de croix contemporain ? Hourra ! Vous avez réussi à vous connecter au service et vous prenez rendez-vous, mais il arrive que le site vous propose bien un jour, mais pas l’heure, ce qui rend votre démarche inutile. Vous recommencez et ce, à plusieurs reprises, légèrement agacé. Avec un peu de chance, après sept ou huit tentatives, vous arrivez à bloquer un jour et une heure, et ce à trois ou quatre semaines. Si vous insistez pour déposer votre dossier dans l’antenne de Police de votre mairie, il vous faudra patienter six à sept semaines. Tant pis, vous acceptez la première date proposée dans le 20e ou le 13e arrondissement.

Supposons que le jour où vous avez rendez-vous (vous devez y être en personne, empreintes digitales obligent), le métro soit en panne (« merci de votre compréhension ») ou que vous vous soyez foulé le pied ou tout bonnement que vous soyez victime d’une panne d’oreiller, vous recommencez, et vous aurez peut-être votre passeport au mois de novembre, mais sans garantie.

Votre séjour en famille organisé et prépayé au Colorado, chez les amish et dans les parcs nationaux de l’Ouest américain, est tombé à l’eau et il ne vous est pas possible de récupérer vos arrhes, le défaut de passeport en cours de renouvellement n’étant pas un cas de force majeur.

Il semble donc que le gouvernement, Monsieur Valls en tête, entend se donner les moyens pour inciter les français à passer leurs vacances dans l’hexagone et décourager toute velléité de voyage au long cours.

Vous pouvez vous rabattre sur la Réunion (attention aux requins), les Antilles (attention aux peaux de bananes), à Saint-Pierre et Miquelon (attention aux phoques) ou sur la Nouvelle Calédonie (attention au nickel). Choisissez la Corse si vous aimez les feux d’artifices, le soleil et l’accueil souriant.

Que diantre feriez-vous au Brésil ou aux États-Unis, alors que nous sommes en crise et que le fisc frappe tous les jours à votre porte avec de nouvelles idées ?

La préfecture prétend sans hilarité, même avec grand sérieux, que ces nouvelles mesures et les brimades assorties sont destinées à assurer la fluidité du processus de délivrance des passeports. Voilà donc l’explication de cette galère ! Le soleil est revenu sur Paris, merci Monsieur le Préfet.