Laurence Parisot, Présidente du MEDEF, a présenté le 6 octobre une version actualisée du « code de gouvernement d’entreprise » pour une autorégulation des entreprises sur les rémunérations des dirigeants et des conditions d’exercice de leur mandat social.

Le MEDEF et l’AFEP ont entendu ainsi donner le ton, en réponse à l’injonction du Président de la République, ce dernier annonçant en septembre : « ou bien les professionnels se mettent d’accord sur des pratiques acceptables, ou bien nous réglerons le problème par la loi avant la fin d’année ». C’est dans cet esprit que le code MEDEF-AFEP propose aux entreprises d’instaurer et, pour une bonne partie d’entre elles, de renforcer leur politique de transparence sur le mode de rémunération des dirigeants et de cohérence des montants ainsi attribués avec l’intérêt général de l’entreprise.

Afin de susciter réaction et adhésion des sociétés du CAC40, la création d’un comité d’information a été envisagée par un député de la majorité. Les rapports annuels 2008 seront donc tout particulièrement étudiés par le Parlement. L’Autorité des Marchés Financiers (AMF) annonce, quant à elle, outre la publication de nouvelles recommandations pour la rédaction des documents de référence pour les sociétés côtées sur Euronext Paris, qu’elle sera en mesure de publier une liste des entreprises « en règle » début 2009.
L’AMF « encourage les sociétés à appliquer les recommandations formulées le 6 octobre 2008 par l’AFEP et le MEDEF en matière de rémunération des dirigeants. […] L’AMF a ainsi adressé un courrier invitant les sociétés à diffuser par voie électronique et à mettre en ligne sur leur site Internet, d’ici au 31 décembre 2008, la ou les décisions prises en la matière par leur conseil » (Communiqué de presse AMF, 27 novembre 2008).

Le message est clair : le « code de gouvernement d’entreprise » doit devenir une forme de ligne de conduite en matière de gouvernance. Plusieurs sociétés cotées, tel le Groupe France Télécom / Orange, ont rapidement répondu à l’appel. Dans un communiqué, le Conseil d’administration de France Télécom a ainsi déclaré, le 3 décembre 2008, que « le code AFEP-MEDEF ainsi modifié est celui auquel se réfèrera France Télécom pour l’élaboration du rapport prévu à l’article L. 225-37 du Code de Commerce à compter de l’exercice en cours ».

En parallèle, les sociétés devront vraisemblablement anticiper l’application des mesures annoncées par le MEDEF et réaliser au besoin des audits juridiques sur la situation de leur dirigeant. L’élaboration de stratégies de rémunération semble donc nécessaire afin de s’assurer une sécurité juridique en matière d’information financière.

Référence désormais incontournable, le code de gouvernement d’entreprise MEDEF-AFEP s’articule autour de 4 axes :

– L’impossibilité de cumuler mandat social et contrat de travail

Seuls seront concernés par cette recommandation, les présidents, directeurs généraux, directeurs généraux délégués des SA à conseil d’administration ou avec un directoire, le président du directoire ou directeur général unique dans les SA avec un directoire et un conseil de surveillance et enfin, les gérants de sociétés en commandites par actions dont le mandat a notamment été confié après la publication de cette recommandation.

– L’encadrement des conditions d’attribution et du montant des indemnités de départ (« parachutes dorés »)

Les recommandations encadrent les conditions d’attribution d’une indemnité et son montant. Une indemnité de départ ne saurait donc être attribuée à un mandataire social qui décide volontairement de quitter la société pour exercer de nouvelles fonctions ou changer de fonctions à l’intérieur du groupe. Dans son quantum, cette indemnité serait plafonnée à deux ans de rémunération (fixe et variable inclus).

Cette limitation est, par ailleurs, vivement encouragée par les dispositions fiscales discutées actuellement par le Parlement.

En effet, l’amendement au projet de Loi de Finances pour 2009, modifiant l’article 39-5 du Code Général des impôts a été adopté par le Sénat. Cet amendement vise « à limiter l’avantage fiscal associé aux rémunérations de type « parachute doré » : au-delà de six fois le plafond de la sécurité sociale (soit environ 200.000 euros) pour un même bénéficiaire, ces sommes ne seraient plus, comme c’est le cas aujourd’hui, déduites du bénéfice imposable de l’entreprise. »

L’amendement prévoit, en effet, que ces rémunérations « sont admises en déduction du bénéfice net dans la limite de six fois le plafond annuel de la sécurité sociale par bénéficiaire».

– L’encadrement des retraites supplémentaires

Pour pouvoir bénéficier d’un tel avantage, le bénéficiaire doit être mandataire social ou salarié de l’entreprise lorsqu’il fait valoir ses droits à la retraite. Par ailleurs, le conseil d’administration ou le directoire doit fixer les conditions d’attribution de ce régime, telle que l’ancienneté.

Le montant des droits attribués au bénéficiaire ne doit représenter, annuellement, qu’un pourcentage limité de sa rémunération fixe. Reste à savoir où se situe la limite, ce qui n’est pas simple à apprécier sachant que le contrôle s’opérera a posteriori par les juges éventuellement saisis.

– L’encadrement de l’attribution de stock-options

Les modalités d’attribution des options de souscription ou d’achat d’actions doivent s’inscrire dans une véritable politique d’association au capital et non, comme un complément de rémunération. Dans cet esprit, une attribution d’option réservée aux mandataires sociaux doit nécessairement s’accompagner d’un dispositif complémentaire d’association des salariés aux performances de l’entreprise. De même, l’attribution d’actions aux dirigeants doit être soumise à des conditions de performance.

Prologeant cette préconisation du Code AFEP-MEDEF, la loi en faveur des revenus du travail du 3 décembre fixe les modalités précises de l’encadrement des stock-options. Ainsi, aucune attribution autorisée par une assemblée à venir ne pourra avoir lieu si elle ne bénéficie pas aussi aux salariés de la société et à 90 % des salariés de ses filiales ou si ces salariés ne profitent pas d’un accord d’intéressement ou de participation. L’association des salariés devient donc une condition de mise en oeuvre des plans de stock options.

Ces évolutions en matière de rémunération s’éloignent un peu des principes de gouvernement d’entreprise, plaidant pour une rémunération liée au rendement de l’entreprise. Mais faut-il pour autant imposer cette contrainte d’une participation des salariés alors que la majorité d’entre eux souhaitent améliorer leur pouvoir d’achat, non leur « épargne forcée ». La solution pourrait s’avérer contre-productive en terme de rémunération. Paradoxalement, dans un contexte de déficience à l’égard du modèle de financement des entreprises, de telles réactions font aussi des dirigeants les victimes désignées d’avance. Ce n’est pas bon pour le dynamisme de l’économie dans son ensemble. Comme le dit le bon sens populaire, pour vivre heureux vivons cachés. Il est peut être temps de redécouvrir les joies du non-coté, de la société fermée non soumise à toutes ces contraintes réglementaires, tant que cet espace de souplesse existe encore…