Loi n°2014-788 du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires

Promesse de François Hollande lors de sa campagne en 2012, la loi portant réforme du statut des stagiaires a été adoptée en juillet 2014 et insérée au sein des articles L.124-1 et suivants du Code de l’éducation.

Si de nombreux avantages sont accordés aux stagiaires, la loi contient des dispositions qui vont nécessairement limiter le nombre de stages ouverts aux étudiants.

La loi règlemente les périodes de formation en milieu professionnel ou les stages prévus dans le cadre des enseignements scolaires et universitaires.

Des avantages nouveaux

Le nouvel article L.124-13 du Code de l’éducation permet aux stagiaires de bénéficier des mêmes avantages que les salariés, c’est-à-dire :

  • Le droit à des congés et autorisations d’absence pour les stages d’une durée supérieure à deux mois ;
  • L’accès au restaurant d’entreprise ou aux titres-restaurant ;
  • La prise en charge des frais de transport ;
  • Le droit à des congés et autorisations d’absences en cas de grossesse, de paternité ou d’adoption d’une durée équivalente à celle prévue pour les salariés.

Les organismes d’accueil seront tenus de veiller à ce que les stagiaires bénéficient des mêmes règles que celles applicables aux salariés quant aux durées maximales quotidiennes et hebdomadaires de travail, la présence de nuit, le repos quotidien ou hebdomadaire, les jours fériés mais également à ce que les stagiaires n’effectuent pas des tâches dangereuses.

La réforme prévoit d’autre part une augmentation de la gratification mensuellement versée aux stagiaires effectuant un stage supérieur à deux mois. Cette hausse ne s’applique qu’aux stages signés après le 1er septembre 2015.

Pour les stagiaires en cabinet d’avocats, l’augmentation aura peu d’impact car la profession a déjà adopté un accord professionnel en 2007 qui prévoit un montant supérieur pour les stages de plus de trois mois.

Une limitation de la durée du stage

Le texte limite la durée maximale des stages à six mois.

À titre dérogatoire certaines formations pourront encore bénéficier, jusqu’au 10 juillet 2016, d’une durée de stage supérieure. Un décret fixera la liste des formations concernées.

Cette mesure a pour but de promouvoir le contrat en alternance pour les durées supérieures à 6 mois.

La mise en place d’un quota du nombre de stagiaires

C’est là le point le plus critiqué de la loi. Le nombre de stagiaires par organisme d’accueil sera limité par décret en Conseil d’État.

S’il n’a pas encore été fixé, le gouvernement a laissé entendre que le nombre de stagiaires ne pourra dépasser 10% de l’effectif de l’organisme d’accueil ou 3 stagiaires pour les entreprises de moins de 30 salariés.

L’objectif est bien évidemment d’empêcher les employeurs d’avoir recours à des stagiaires plutôt que de recruter des salariés. Il est d’ailleurs expressément prévu à l’article L.124-7 du code de l’éducation que les stages ne peuvent servir à remplacer un contrat de travail [1].

Pour autant, ce point de la réforme suscite l’inquiétude des étudiants autant que le mécontentement des employeurs. Les stages, non seulement permettent de découvrir le monde du travail et l’application pratique de l’enseignent reçu, mais sont aussi devenus indispensables sur un CV voire font partie intégrante de certaine formations. S’il était déjà difficile pour les étudiants de trouver un stage, cette réforme risque de leur compliquer singulièrement la tâche.

Par ailleurs il est utile de rappeler qu’il existe un délai de carence légal entre l’accueil successif de stagiaires, au titre de conventions de stage différentes, pour effectuer des stages dans un même poste (ce délai est  égal au tiers de la durée du stage précédent).

L’application du quota aux professions libérales : l’exemple des cabinets d’avocats.

Pour les stages en cabinet d’avocats cette réforme soulève aussi une difficulté pour les étudiants en droit et en master 2. En effet, le quota de stagiaires étant calculé sur l’effectif  « salarié » cela ne permet pas de prendre en compte les avocats non-salariés (en profession libérale), mais seulement le personnel administratif, ce qui limite nécessairement de façon drastique le nombre de stagiaires. Selon l’estimation de l’Ordre des avocats de Paris[2] il y aurait plus de 11.000 stagiaires en cabinet d’avocats dont 8.000 sont généralement des étudiants en master 2. Pour éviter cette situation l’Ordre a proposé de prendre en compte l’effectif total, les salariés et les professionnels libéraux, pour le calcul du quota de stagiaires.

En revanche, cette disposition ne s’appliquera a priori pas aux élèves avocats dont la formation est par ailleurs encadrée par la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971. La secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur Geneviève Fioraso a confirmé lors des débats parlementaires que « les élèves avocats n’étaient pas concernés » et qu’ils ne seront pas « comptabilisés parmi les stagiaires dont le nombre sera désormais plafonné »[3].  

Sanctions

La loi prévoit des sanctions administratives en cas de manquement, à savoir une amende pouvant aller jusqu’à 2.000 € par stagiaire et 4 000 € en cas de réitération dans un délai d’un an.

Compte tenu des enjeux, le décret d’application sur le calcul des quotas et la clarification du domaine d’application sont attendus avec impatience et une certaine appréhension.

Contact : stephanie.faber@squirepb.com
 


[1]   « Aucune convention de stage ne peut être conclue pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’organisme d’accueil, pour occuper un emploi saisonnier ou pour remplacer un salarié ou un agent en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail »
  [2] Document de l’Ordre des Avocats de Paris intitulé « Impact de l’encadrement des stages de droit commun sur les stages « élèves avocats » et les stages en cabinets d’avocats. »

[3] Séance du Sénat du 14 mai 2014 : www.senat.fr/seances/s201405/s20140514/s20140514_mono.html