A quelques jours du premier match de la Coupe du monde de football, le 11 juin, l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) vient de rendre ses premiers arbitrages et octroie 17 agréments à 11 opérateurs.

La liste, publiée au Journal officiel (www.legifrance.gouv.fr), datée du 8 juin 2010 devrait faire grand bruit tant l’événement était attendu dans le « petit monde » des jeux d’argent en ligne.

Des conditions strictes

11 élus et beaucoup de déçus qui devront attendre et compléter leur dossiers dans les prochaines semaines, afin d’obtenir le précieux sésame.

Concernant les éventuels refus définitifs (aucun à ce jour), viendra l’heure des recours et des actions judiciaires dans la mesure où ils ne seraient pas justifiés.

Le législateur a placé la barre très haut ; les spécifications et obligations techniques étant parmi les plus contraignantes au monde, proches de celles applicables aux établissements financier exerçant en ligne, ce qui nécessite généralement la mise en œuvre d’accords avec des sociétés spécialisées du secteur et le déploiement de ressources financières que seul un petit nombre est en mesure d’assurer.

Seuls les sites en « .fr » des opérateurs ayant reçus l’agrément de l’ARJEL sont autorisés.

Le consommateur, confronté à une offre déjà pléthorique, devra faire le tri et consulter le site de l’Autorité de régulation des jeux en ligne (www.arjel.fr) pour vérifier la liste des opérateurs admis en France. Le logo de l’ARJEL devrait également être affiché sur les sites légaux.

Précisons que tous les sites non-agréés sont illégaux et qu’y jouer est donc interdit. Le joueur qui s’y aventurerait n’aurait aucune garantie de sécurité, ni celle de recouvrer ses gains éventuels.

En outre, l’ARJEL s’est engagée à combattre fermement les sites illégaux et à tout mettre en œuvre pour les empêcher de proposer leurs services aux joueurs français. Ce combat de longue haleine mené par des cyber-patrouilleurs formés à cet effet promet d’être intense tant il est essentiel de garantir les opérateurs agréés contre la concurrence, seul motif susceptible de justifier une fiscalité élevée.

Un budget conséquent

Pour les opérateurs, s’aventurer sur le marché des jeux d’argent en ligne nécessite une organisation sans faille et des soutiens financiers voire politiques.

En effet, les textes sont clairs et ne laissent que peu de place à l’amateurisme dans la mesure où il s’agit de manier l’argent du public. Les dépenses nécessaires à la mise en œuvre du seul outil technique sont très conséquents ; preuve en est, les opérateurs agréés le 8 juin 2010 sont pour la plupart des sociétés notoirement connues et disposant d’un important cash-flow ; certaines déclarant préparer l’ouverture depuis près de 18 mois.

Même s’il est possible de recourir à des sociétés spécialisées dans la mise en œuvre de solutions techniques dédiées (déjà actives outre-manche : coffre-fort électronique, etc.) et à l’exploitation de jeu en « marque blanche » (programmes informatiques de jeux en ligne proposés par une société aux opérateurs qui en achètent les droits et les exploitent ensuite sous leur propre marque), les coûts seront nécessairement élevés, notamment en terme de personnel.

Par ailleurs, le budget des dépenses « média » permettant de se faire connaître et de se démarquer s’élèverait, selon certain, à plusieurs millions d’euros.

On relèvera en outre, l’attention portée par le législateur à la fonction de support juridique, qui doit être permanente compte tenu des obligations à respecter et de la transversalité des domaines que recouvre ce secteur.

Les sociétés désireuses d’entrer sur ce marché devront donc affiner leur business plan et leur stratégie d’investissement à long terme, privilégiant pour les unes la détention directe de licence et pour les autres la prise de participation dans des opérateurs déjà détenteurs de licence ou les accords de partenariat, très en vogue actuellement. Une augmentation sensible des acquisitions ciblées dans le secteur est à prévoir.

Paris « oui », poker « pas encore »

Si l’Etat à tout mis en œuvre pour être en mesure de canaliser le flux de paris des joueurs français, en vue de la Coupe du monde 2010, qui devraient dépasser largement ceux de 2008 et représenter un montant jamais atteint, la situation est différente concernant le poker.

En effet, les opérateurs agréés ne peuvent pas pour l’instant proposer leur offre aux joueurs français, la parution des décrets d’application ayant été retardée (au moins jusqu’au 28 juin) du fait d’un avis motivé de l’État de Malte auprès de la Commission européenne, s’opposant à une des dispositions du texte français, qui oblige le joueur français à s’inscrire sur un site agréé en France, disposition contraire selon Malte, à la liberté de circulation des biens et services. L’Europe tranchera, opérateurs et joueurs attendront.

Il s’agit sans doute là d’une des batailles qui émailleront l’ouverture du marché tant que celui-ci ne sera pas régulé au plan européen.

La dernière décision de la Cour de Justice de l’Union européenne confirmant le monopole en vigueur aux Pays-Bas (Décision du 3 juin 2010, C-258/08 – eur-lex.europa.eu) dans la droite ligne de la décision rendue pour le Portugal [1] ne laisse pourtant rien entrevoir d’une possible initiative globale et structurée que certains appellent de leurs vœux.

Le lobbying déjà intense auprès de la Commission devrait se poursuivre dans les mois et années à venir. L’ouverture prochaine du marché en Grèce et peut être même aux USA attisent l’appétit des grands groupes mondiaux.

Une offre démultipliée

Le marché des jeux d’argent en ligne qui s’ouvre aujourd’hui devrait entraîner de profonds changements dans la manière d’envisager paris sportifs, hippiques, ou encore poker.

L’offre, tout d’abord, ne sera plus limitée à celle du PMU et de la FDJ, et permettra au consommateur de choisir entre plusieurs opérateurs, celui mettant à sa disposition la meilleure offre (promotions, bonus, etc.).

L’émergence de sites comparant les côtes, informant le public sur les manifestations, ou encore de nouveaux journaux spécialisés démontrent la vigueur de ce marché qui attire nombre de jeunes talents et de dirigeants de groupes à la recherche d’un relais de croissance.

En matière de paris sportifs, et à côté du traditionnel pari sur le résultat final, voient le jour toute une série de paris « en direct », au cours de l’événement, qui font déjà le succès de nombreux opérateurs outre-manche et dans le monde.

Une première liste des 15 sports et type de paris autorisés vient d’être publiée par l’ARJEL (www.pre-arjel.fr/IMG/pdf/2010-009.pdf et on peut penser qu’elle devrait s’étendre à l’avenir, permettant à certains sports jusqu’ici peut médiatisés de trouver un nouveau relais de croissance.

En effet, le droit de parier implique le respect du droit « aux paris », qui porte sur l’organisation de paris en relation avec une manifestation ou compétition sportive. Spécificité française qui impose aux opérateurs de signer des contrats non-exclusifs avec les instances et fédérations pour pouvoir proposer des paris dans ces disciplines. Le décret n° 2010-614 du 7 juin 2010 encadre la conclusion des contrats d’organisation de paris au sujet desquels l’opérateur devra être vigilant (les discussions relatives au détenteur des droits afférents au match de football en disent long).

S’agissant des paris hippiques, le démarrage devrait être plus progressif et permettre aux joueurs l’accès à un grand nombre de compétitions.

Enfin, l’ouverture du marché du poker en ligne, absent de l’offre jusqu’ici proposée en France du fait du monopole de la FDJ, devrait contenter nombre de joueurs professionnels et amateurs qui pourront ainsi partager leur passion et participer aux sélections des plus grands tournois.

Si la possibilité d’affronter des joueurs d’autres pays ne semble pas envisageable à ce stade, il y a fort à parier que la loi connaîtra des aménagements dans les années à venir, permettant ce type de rencontre. Le développement de loteries européennes démontre en effet l’intérêt du public pour les jeux à cette échelle.

La protection des joueurs

L’ouverture « oui », mais pas n’importe comment, ni à n’importe quel prix, car derrière le joueur, il y a un consommateur qui doit être protégé et entouré, tant les convoitises sont grandes.

Le principe du jeu « responsable » a guidé l’ouverture et devrait continuer à irriguer chacune des branches de ce nouveau pan de l’économie non plus souterraine mais officielle, à tout le moins pour les sites agréés.

Message d’alerte sur le jeu excessif, numéro de téléphone en cas de difficultés, taux de retour au joueur limité par décret (85 %), étude d’ampleur sur le jeu et ses excès, tout devrait être mis en œuvre pour que le jeu reste un plaisir et que les excès soient combattus.

L’Etat a tenu ses promesses et après deux années de travaux et de débats intenses, place aux jeux !

De nombreuses questions techniques, juridiques et judiciaires vont se poser dans les mois à venir, consécutivement à cette ouverture. Les équipes d’Hammonds sont prêtes à y répondre et à accompagner, conseiller et défendre leurs clients sur ce terrain.

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[1] A ce sujet voir aussi l’article paru dans La Revue: Confirmation de l’arrêt « Ligua portuguesa » par l’avocat général de la CJUE
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Hammonds conseille des sociétés de paris en ligne, des comparateurs de côtes, des opérateurs français et internationaux, des médias et accompagne également de nombreuses sociétés du monde du sport dans leur développement sur ce secteur et dans leurs opérations de rapprochement.