Cass. soc. 23 mai 2007 : n° 06-43.209

En matière contentieuse, l’issue du litige dépend en grande partie des preuves rapportées par chacune des parties.

L’article 9 du Nouveau Code de Procédure Civile précise à cet égard que s’il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de leurs prétentions, cela doit être fait « conformément à la loi ».

Ce même article prévoit que cette exigence s’impose également au juge lorsqu’il ordonne des mesures d’instruction, ces-dernières devant être « légalement admissibles ».

A titre d’exemple, sont exclus les procédés expressément interdits par la loi, tel tout procédé de captation téléphonique portant atteinte à la vie privée, hypothèse prévue par l’article 226-1 du Code pénal.

En l’absence de texte spécifique, la jurisprudence a encadré les moyens de preuve utilisés par les parties, en recourant aux notions de loyauté des débats ou de bonne foi contractuelle.

S’est ainsi posée la question de savoir si une partie pouvait verser aux débats l’enregistrement ou la retranscription d’une conversation téléphonique qu’elle a eue avec son adversaire.

La Cour de cassation y a répondu par la négative en jugeant que « l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée, effectué et conservé à l’insu de l’auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue » ( Cass civ 2ème 7 octobre 2004, Bull civ II n°447).

Le 27 mai dernier, dans une affaire où une salariée voulait démontrer le harcèlement sexuel de son employeur, la chambre sociale de la Cour de cassation a toutefois circonscrit cette notion de loyauté.
Selon elle, la production par une partie des messages SMS ou « textos » envoyés par son adversaire sur son téléphone portable ne constitue pas un mode de preuve déloyal.

En effet, selon la Cour «si l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée, effectué à l’insu de l’auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n’en est pas de même de l’utilisation par le destinataire des messages écrits téléphoniquement adressés, dits SMS, dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur ».

Compte tenu de la terminologie employée, la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation, dépasse le seul domaine du droit du travail et s’étend à tout litige en matière civil.
Le SMS, « Short Message Service », semble ainsi totalement assimilé à un écrit classique sur un support papier et suit logiquement le régime juridique de ce dernier, il peut ainsi être produit comme preuve devant tout tribunal.

Au-delà, les termes généraux de l’arrêt commenté ainsi que la justification adoptée par les juges invitent à penser que la solution adoptée pour les SMS s’appliquera également pour les MMS « Multimédia Message Service » ou messages oraux laissés sur un répondeur ou une messagerie vocale, l’auteur de ces messages sachant pertinemment que ses propos sont enregistrés.

Il semble qu’un principe plus général relatif à la loyauté des débats et à la licéité de la preuve se profile :

La preuve par l’enregistrement n’est recevable que si la partie qui tient les propos litigieux sait ou est en mesure de savoir qu’elle est enregistrée.