Mécanisme indispensable aux cessions de droits sociaux, notamment sous la forme des clauses de « good/bad leaver » dans les opérations de LBO, la promesse unilatérale voit son efficacité renforcée par la réforme du droit des contrats.

En effet, le nouvel article 1124 du Code civil, qui lui est consacré, vient contrer la jurisprudence hostile inaugurée par l’arrêt « Cruz » rendu par la 3ème chambre civile le 15 décembre 1993[1]. Confirmée le 11 mai 2011[2] , cette jurisprudence affirmait le droit du promettant de revenir sur sa promesse avant la levée de l’option par le bénéficiaire.

La codification de la promesse unilatérale à l’occasion de la réforme du droit des contrats vient dissiper les incertitudes sur l’efficacité de ce mécanisme, mais les solutions retenues créent aussi de nouvelles difficultés.

 « Art. 1124. – La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.
La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis.
Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l’existence est nul. »

Si le second alinéa de cet article condamne toute rétractation du promettant, le troisième alinéa déroge à cette règle. En effet, inspiré de la théorie de l’efficient breach of contract, il conditionne la nullité du contrat conclu en violation de la promesse à la connaissance de cette promesse par le tiers contractant.

Cette solution fragilise la garantie accordée au bénéficiaire de la promesse, car la connaissance de celle-ci par le tiers peut s’avérer difficile à prouver. En revanche, le bénéficiaire pourra probablement engager la responsabilité contractuelle du promettant ayant trahi sa promesse : la sanction de la violation se limitera alors à des dommages-intérêts.

Face à ces nouvelles incertitudes, des précautions s’imposent. Trois clauses différentes peuvent ainsi s’avérer utiles.

Clause « d’ignorance »

Pour l’acquéreur, la clause stipulant qu’il n’a connaissance d’aucune promesse consentie à un tiers par le cédant s’avère une précaution indispensable pour faire échec à une action en nullité d’un bénéficiaire éventuel. Toutefois, une telle clause ne sera d’aucun secours à l’acquéreur si le bénéficiaire parvient à prouver qu’il connaissait l’existence de la promesse. Au contraire, si elle est stipulée de mauvaise foi, une clause « d’ignorance » pourrait engager la responsabilité de l’acquéreur : elle est donc à manier avec prudence. 

Clause d’exécution forcée

Pour le bénéficiaire, stipuler une clause d’exécution forcée demeure nécessaire, car la rédaction vague du nouvel article 1124 ne vise pas explicitement cette sanction. En outre, l’efficacité d’une telle clause a déjà été validée par la jurisprudence[3].

Clause de dédit

Stipuler une clause de dédit peut aussi être utile pour dissuader le promettant de violer sa promesse. En effet, si le montant fixé est suffisamment élevé, le promettant aura conscience de la sanction qu’il encourt en revenant sur sa promesse. Cependant, une clause de dédit prévoyant un montant trop élevé peut être requalifiée par le juge en clause pénale et voir son montant diminué.
Enfin, une incertitude demeure quant à la validité du mécanisme de la promesse unilatérale au regard de la Constitution. La rédaction du premier alinéa, qui ne mentionne pas le consentement du promettant, mais accorde au bénéficiaire un « droit d’opter pour la conclusion d’un contrat » qui peut sembler purement potestatif, présente une certaine ambiguïté. Considérant que celui-ci porte atteinte au principe constitutionnel de liberté contractuelle[4], Muriel Fabre-Magnan a ainsi déjà lancé un « appel à QPC » contre ce nouvel article 1124[5] du Code civil.
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  [1] Civ. 3ème, 15 décembre 1993, n°91-10.199 [2] Civ. 3ème, 11 mai 2011, n°10-12.875
[3] Civ. 3ème, 27 mars 2008, n°07-11.721 [4] Conseil constitutionnel, 13 juin 2013, n° 2013-672 [5] « De l’inconstitutionnalité de l’exécution forcée des promesses unilatérales de vente », Recueil Dalloz 2015, p.826