Scélérat ! c’est ainsi qu’un député de l’opposition avait qualifié pendant les débats parlementaires cet article 18 qui permet aux entreprises de « déroger » aux 35 heures par accord collectif.

L’article 18 autorise en effet les partenaires sociaux à négocier et à définir par accord collectif d’entreprise ou, à défaut par une convention de branche, le contingent d’heures supplémentaires.

Il a été notamment reproché au Gouvernement de ne pas avoir respecté la position syndicale commune du 9 avril 2008 (inspiratrice de la loi) qui prévoyait que les accords d’entreprise ne pouvaient que « préciser à titre expérimental l’ensemble des conditions qui seront mises en œuvre pour dépasser le contingent conventionnel d’heures supplémentaires prévu par un accord de branche antérieur à la loi du 4 mai 2004 en fonction des conditions économiques de l’entreprise ».

Le texte définitivement adopté par le parlement allait plus loin puisqu’il disposait qu’une convention d’entreprise (ou de branche) pouvait fixer « la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel ».

Cette dernière phrase a été censurée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 7 août 2008 (Cons. Const., déc. N° 2008-568 DS). Le Conseil a estimé que le Législateur devait préalablement « définir de façon précise les conditions de mises en œuvre » des principes fondamentaux du droit du travail dont les conventions collectives peuvent préciser les modalités concrètes d’application. Tel n’était pas le cas s’il revenait à la négociation collective de fixer la durée du repos compensateur.

Accusé d’ouvrir la porte à un dumping social ainsi que d’introduire une régression sociale considérable, qu’en est-il véritablement de cet article aujourd’hui, après débats et censure ?

Pour toute heure supplémentaire effectuée dans la limite du contingent (pouvant désormais être négocié conventionnellement), l’obligation de paiement majoré à un taux de principe de 25 % pour les huit premières heures et de 50 % au-delà est maintenue. L’obligation légale, au-delà de la 41ème heure d’accorder un repos compensateur (en plus de la majoration salariale) a été supprimée par la loi. Il sera cependant observé que les accords collectifs qui prévoiraient un tel repos restent en vigueur.

Pour les heures effectuées au-delà du contingent, il est maintenu une contrepartie obligatoire en repos (ex repos compensateur) dont le taux est toujours de 50 % pour les entreprises de 20 salariés au plus et de 100 % pour les entreprises de plus de 20 salariés.

L’article 18 de la loi du 21 août 2008 constitue ainsi une nouvelle brèche au sein du dispositif légal sur les 35 heures, dont l’objectif est de détricoter progressivement et méthodiquement la réduction du temps de travail. Une incertitude demeure cependant : un accord d’entreprise peut-il prévoir un contingent d’heures supplémentaires supérieur à celui, le cas échéant, prévu par l’accord de branche ? La rédaction du texte de l’article 18 (« …défini par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par un accord de branche») postule pour une réponse positive, ce qui permettrait à l’accord d’entreprise de déroger à un accord de branche.